Journal d'un étudiant (Edmond Géraud), pendant la Révolution (1789-1793)

PENDANT LA RÉVOLUTION. 983

leur exécrable forfait. Ces forcenés cherchèrent pen: dant longtemps le général Rochambeau pour lui faire subir le même sort.

« Il n’est plus douteux que le projet est déjà formé, ou de faire périr nos généraux sous le fer des assassins, ou de les épouvanter et de leur faire abandonner l'armée. Si l’on laisse à la cour le soin de diriger la guerre, nos ennemis seront toujours instruits d'avance de nos plans de campagne et nous battront sans cesse : d'ailleurs il est absurde que le Roi et son Conseil puissent, du fond du Louvre, juger de la nécessité d'une attaque, ou d'une retraite, ou d'un siège, etc. C'est aux généraux seuls qu'il appartient de conduire leur armée.

« J'espère beaucoup en Lückner, il montre du dévouement et de l’activité. Quoique je n'aime point La Fayelte et que son patriotisme me soit plus que suspect, j'ai cependant assez de confiance en lui; il est jeune, il aime la gloire, il a de grandes fautes à réparer : voilà qui peut rassurer les patriotes qui ont su l'apprécier à sa juste valeur.

« Ilfaut avouer que les légers revers que nous venons d'éprouver ont frappé de tristesse les Parisiens, qui ne s’attendaient qu'à des victoires. Je n'ai point partagé la terreur presque générale, mais le massacre des officiers m'a affligé, surtout lorsque j'ai su qu'ils étaient entièrement dévoués à la Révolution. Le bruit de la mort des chasseurs tyroliens faits prisonniers