Journal d'un étudiant (Edmond Géraud), pendant la Révolution (1789-1793)

290 LE JOURNAL D'UN ÉTUDIANT

nation, qu'en délivrant l'État de ces prêtres séditieux, engeance exécrable, qui désole nos contrées et menace notre liberté. Tels sont les titres des Brissot, des Guadet, des Vergniaud à l'estime et à l'amour de leurs concitoyens; tandis que leur infatigable détracteur, ayant déserté le poste où l'avaient placé la confiance et la reconnaissance publiques, s'abandonne, en furieux, à de pernicieuses dénonciations, attentatoires à l'union et à la tranquillité qui doivent régner au milieu de nous. Tels sont les titres de Robespierre à la haine de ses conciloyens. »

M. Géraud répond à son fils :

« J'ai, comme toi, cessé d'admirer Robespierre. Pétion seul réunit mes vœux. S'il arrivait qu'il cessât d'être Pétion, c'est-à-dire la vertu, je ne croirais plus à l'incorruptibilité de personne. »

Malgré les préoccupations bien légitimes qu'inspirait la situation, M. et Mme Géraud projetèrent, dans les premiers jours de mai, d'aller passèr quelque temps à Paris avec leurs enfants, et ils les chargèrent de leur chercher un appartement voisin de celui qu'ils occupaient eux-mêmes. Edmond, ravi de cette perspective, s'empresse de prévenir ses parents qu'il a trouvé ce qu'ils désirent, et il les engage à ne pas se laisser détourner de leurs projets par les bruits plus ou moins menaçants que l’on répand sur la tranquillité de la capitale.