Journal d'un étudiant (Edmond Géraud), pendant la Révolution (1789-1793)

28 LE JOURNAL D'UN ÉTUDIANT

« Je suis très persuadé, maman, de la vérité de tout ce que tu me dis sur ma religion, aussi je ne manque jamais de prier l'Être Suprême soir et matin; je m'élève en esprit jusqu'à lui, autant que la grossièreté de mon âme peut me le permettre. J'ai apporté de Bordeaux un livre de prières que je laisse de côté, tant je le trouve insipide. Je voudrais bien savoir qui fut le premier après Jésus-Christ qui composa des prières pour son prochain; voilà qui m'a paru de tout temps fort ridicule. Personne ne peut mieux savoir que moi où le soulier me blesse... »

Mme Géraud insiste encore auprès de son fils pour qu'il fréquente les dimanches l'hôtel de Hollande, car l'exercice du culte étant interdit aux Réformés, ils ne peuvent assister aux offices que dans les hôtels des ambassadeurs de leur religion.

Edmond s'empressa de se conformer aux désirs paternels ; il put bientôt annoncer qu'il traduisait les Odes d'Horace, les Discours de Tacite et de Tite Live, et qu'il travaillait très sérieusement les mathématiques. De plus il suivait trois fois par semaine au Collège de France les cours qui rentraient le mieux dans le cadre de ses travaux.

Le Collège de France, fondé par François [* sous le nom de Collège Royal, avait été reconstruit en entier sous Louis XVI sur les plans de Chalgrin. Vingt professeurs, cheisis parmi les plus éminents, y ensei-

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gnaient la littérature, les sciences, le droit, l’histoire,