L'Autriche et la Hongrie de demain les différentes nationalités d'après les langues parlées : avec de nombreux tableaux statistiqes et 6 cartes ethniqes
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de ceux qui auront le redoutable honneur de refaire la carte de l’Europe sera, au contraire, d'aborder sans hésiter et de résoudre, sans atermoiements, tous les problèmes grands et petits qui se poseront devant eux.
Après avoir fait expier leurs crimes aux Germano-Magyars et les avoir rendus inoffensifs pour longtemps, il faudra songer à libérer tous ceux qui, depuis des siècles, ont souffert l'oppression d’impitoyables tyrans.
Dans l’effroyable secousse ressentie dans la conflagration universelle allumée par la folie germanique, toutes les nationalités, les petites surtout, ont pris conscience d’elles-mêmes. Elles prétendent, avec juste raison, à l’honneur d’être maîtresses de leur existence politique, administrative et sociale. Elles n’ont pas eu à se louer des décisions d’aucune des conférences qui réorganisèrent l’Europe dans la première moitié du dix-neuvième siècle. La Belgique, par exemple, pour ne parler que de la plus meurtrie, dut s’effacer devant les convenances particulières d’autres puissances. Et c’est cette petite nation humiliée et mutilée par la Conférence de Vienne de 1815, par la Conférence de Londres et les traités de 1831 et de 1839, qui a donné au monde l’émouvant exemple d’un peuple demeurant fidèle jusqu’au total sacrifice de soi-même. J’en pourrais dire autant de la Serbie, de la Bohême et des autres petites nationalités opprimées par l'Autriche. Tous ces petits États méritent d’être mieux traités dans l'avenir. D’ailleurs, ils ne se contenteront plus de changer tout simplement de maître, comme un vil troupeau d’esclaves. Ils n’accepteront pas de servir d'appoint, d'équilibre ou de compensation à telle ou telle combinaison diplomatique; ils n’accepteront point d’être séparés de leurs frères de race, d’être l’enjeu de rivalités d'intérêts, favorables aux compromissions et aux solutions moyennes. On aurait dû méditer à Vienne et à Budapest la parole que le grand Cairoli a dit, un jour, au Parlement italien : « Il y a quelque chose de plus fort que toutes les forces armées : c’est l’idée nationale triomphante. » Ni l'Autriche ni la Hongrie n’ont su s'élever au-dessus de la domination matérielle et de la contrainte militaire. Elles n’ont pas compris que ces peuples ont des âmes, alors qu’il n’y a que l’âme qui compte. Il faudra, de toute nécessité, donner pleine et entière satisfaction à leurs aspirations politiques; ce sera, non seulement, un devoir étroit, mais encore et surtout la condition sine qua non de la paix du monde!
I1 faut, notamment, en Autriche-Hongrie, que les nombreuses nationalités, jusqu'ici opprimées, puissent se grouper suivant les affinités que leur imposent leurs origines, leurs mœurs, leurs langages, leurs aspirations. Il faut que le principe des nationalités trouve, partout, son application large et complète, quoi qu’il en puisse coûter à l’amour-propre ou à l’ambition de certains. La chose sera d’ailleurs beaucoup plus facile à réaliser qu’on ne serait tenté de le croire au premier abord, si on veut bien s’attacher aux documents statistiques que j'ai mis en valeur avec la plus grande impartialité. Les hommes de bonne volonté y puiseront des arguments pour régler, en toute justice et équité, les intérêts légitimes en présence.