"La Guzla" de Prosper Mérimée : étude d'histoire romantique (са посветом аутора)

AVANT-PROPOS.

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curiosité, sinon pour le livre mis en cause, du moins pour son spirituel et original auteur, que ses autres ouvrages commençaient déjà à rendre célèbre. Prosper Mérimée, qui avait vingt-quatre ans alors, était, en effet, le véritable auteur de ces ballades prétendues illyriques. Dans une lettre restée inconnue des mériméistes français, lettre adressée à Sobolevsky, ami de Pouchkine, le 18 janvier 183 b, et, dans une préface écrite en 1840 pour la seconde édition de la Gusla, édition parue en 184-2, il a raconté lui-même l’histoire de cette mystification littéraire. « Vers l’an de grâce 1827, dit-il dans cette préface, j’étais romantique. Nous disions aux classiques : « Vos « Grecs ne sont point des Grecs, vos Romains ne sont « point des Romains; vous ne savez pas donner à vos « compositions la couleur locale. Point de salut sans la « couleur locale. » Nous entendions par couleur locale ce qu’au xvn e siècle on appelait les mœurs; mais nous étions très fiers de notre mot, et nous pensions avoir imaginé le mot et la chose. En fait de poésies, nous n’admirions que les poésies étrangères et les plus anciennes : les ballades de la frontière écossaise, les romances du Cid nous paraissaient des chefs-d’œuvre incomparables, toujours à cause de la couleur locale. « Je mourais d’envie d’aller l’observer là où elle existait encore, car elle ne se trouve pas en tous lieux. Hélas ! pour voyager il ne me manquait qu’une chose, de l’argent ; mais, comme il n’en coûte rien pour faire des projets de voyage, j’en faisais beaucoup avec mes amis. « Ce n’étaient pas les pays visités par tous les touristes que nous voulions voir. J.-J. Ampère et moi, nous voulions nous écarter des routes suivies par les Anglais ; aussi, après avoir passé rapidement à Florence, Rome et Naples, nous devions nous embarquer à Venise