La question du sel pendant la Révolution

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« Les propriétés foncières et mobiliaires des ci-devant prêtres, princes, grands seigneurs et financiers sont devenues nationales, de sorte que «la République se trouverait elle-même chargée des trois cinquièmes de cet impôt ».

Mais ce qui, dans le rapport de Beffroy est de beaucoup la partie la plus intéressante, c'est une note que jusqu’à ce jour nous le croyons du moins — personne n’a relevée. La voici in-extenso :

« Je n'avais fait un rapport détaillé sur l’impôt de remplacement, que pour mettre la Convention nationale à même de décréter, sans ajournement, le projet présenté par le Comité des finances ; ainsi on doit me passer les fautes qui peuvent se trouver dans la rédaction ; mais je profite de l'impression pour dire, à mes collègues seulement, que le projet qui leur est présenté par le Comité est indispensable ; que toutes les campagnes surtout se soulèvent à l’idée d'un impôt de remplacement de la gabelle ; que les 83 départements sont excessivement embarrassés des moyens de le percevoir lorsqu'ils l'auront réparti; que la perception serait infailliblement confrerévolutionnaire ; et qu’il est physiquement et matériellement impossible d’en faire d’une manière juste la répartition entre les communes ; qu'il serait absurde d’espérer de tirer deux millions de Paris, un million et demi, un million ou 500 mille livres, plus ou moins, de tel ou tel département; qu'il n’en est aucun des 83 qui ne se trouve cotisé audelà de ses facultés dans cet impôt; et qu'on ne pourrait espérer de le voir arriver à sa fin qu'après trois ou quatre ans de persécution. Ces motifs et la situation de la République ont déterminé le projet du Comité des finances; il a pensé que la justice de la Convention nationale devait devancer et éviter la secousse que la perception de cet impôt amènerait infailliblement. Il a cru que la suppression était un grand moyen contre la malveillance; il l’a propose. Je prie mes collègues d’en peser attentivement les motifs ».

Dans ces conditions il n’est pas surprenant que la Convention se soit ralliée à la proposition de son Comité des finances, et qu'après quelques discussions de détail, elle ait voté le décret suivant, le 17 prairial an Il (5 juin 1794).

! Archives nationales. C. 304. Procès verbal de la séance du 17 prairial an 11. Cf. Pièces justificatives. L'is XLII.