La question du sel pendant la Révolution

IV

Cette propriété a été particulièrement établie pour les salins d'Hyères, par lettres pat ntes du roi Henri IV données le 24 mars 1603, pour empêcher les propriétaires des dites salines d’Hyères de vendre leurs sels, comme ils le pratiquaient, hors du royaume et principalement aux habitants du duché de Savoie, qui le revendaient ensuite à ceux du comté de Provence, au préjudice des gabelles du Roi.

C’est d’après cette loi, confirmée par tous les baux, que les sels des salins d'Hyères, ont toujours été déclarés appartenir au Roi ou à l'Etat, dès l'instant de leur formation, et c’est par une suite de cette propriété reconnue, que la ferme générale s’en emparait et entretenait à grands frais une garde considérable pour leur conservation. C’est aussi par une suite de ce principe bien reconnu que l’Assemblée nationale a improuvé la conduite des propriétaires des salins de la ci-devant Provence, pour avoir disposé d’un sel qui appartenait à la nation, au moment où ils ont eu connaissance du décret qui prononçait la suppression des gabelles, avant même que le décret fut légalement publié. Ainsi c’est d’après cet abus de la loi qu’on ne pouvait ignorer, qu’elle a rendu le décret du 23 avril 1700 en interprétation de l’article 6 de celui du 21 mars précédent, qui réservait à la nation tous les sels existant dans les magasins, greniers, dépôts, salorges dépendant de la Ferme générale, chargée de l’exploitation des gabelles de France. D’après le compte qui en a été rendu et quia été mis sous les yeux du ministre des finances, il a été donné des ordres au directeur des douanes nationales le 26 avril 1790 de faire constater, par les officiers municipaux de la ville d’Hyères, l’objet des ventes qui pouvaient avoir été faites par le propriétaire où ses agents, au préjudice de la nation, malgré les oppositions des préposés à la conservation de ces sels, afin d’en faire payer le montant à raison du prix arrêté par le gouvernement.

C’est ce qui a été exécuté, ainsi qu’il est justifié par plusieurs procèsverbaux rendus depuis le 6 mai jusqu'au 1° juin suivant, signés même des agents de mon dit sieur Deforbin, dont copies légales sont déposés aux archives de la municipalité d'Hyères et dont les doubles ont été remis à l’Assemblée nationale par le ministre des finances à quiils ont été adressés et d’après lesquels il a été décidé que le propriétaire des salins et ses agents étaient responsables de la valeur des sels qu’ils ont vendus à leur profit et que PAssemblée nationale avait décrété appartenir à la nation.

Le propriétaire des salins, ni ses agents, n’ont jamais pu, ni dû faire aucune vente des sels qui étaient formés et déposés entre les mains de l’adjudicataire et qui faisait sa propriété ou du moins celle de l'Etat, ainsi que le porte Varticle 6 du décret du 21 mars; d’autant plus qu’il n’en pouvait prétendre cause ignorance, en ayant été prévenu par le directeur qui leur avait déclaré s'opposer à toutes espèces d'enlèvement de leur part et les rendre responsables des dommages et intérêts de la nation et ce qui a été évidemment constaté par plusieurs procès-verbaux, notamment par celui rédigé le 6 mai, pour établir l’enlèvement des sels faits jusqu’à cette époque, enlèvement qu'ils s'étaient obligés de cesser en se soumettant à continuer d’assister aux chargements qu’il avait suspendus, pour l’approvisionnement des greniers de l'Etat, notamment ceux de Marseille, de St-Tropez, de Fréjus, d'Antibes et autres auxquels chargements les dits agents sont venus s’opposer de nouveau le 15 du même mois, avec force et attroupement par ordre du dit propriétaire des salins — ainsi