La question du sel pendant la Révolution

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ferait délivrer à chaque municipalité une quantité de sel proportionnée à la plus faible consommation du pays; les municipalités ensuite seraient chargées de répartir ce sel entre les contribuables, qui seraient tenus, en le prenant, de le payer au prix fixé par la loi. Ceux qui négligeraient de retirer leur sel du grenier, seraient imposés à sa valeur ; et quant au surplus de leur consommation, comme pour les salaisons, on rendrait le sel libre et marchand; de sorte que, selon l’auteur, l’agriculture retirerait de ce régime tous les avantages qu’elle peut attendre du commerce libre du sel, et que la rigueur de la contribution paraîtrait adoucie par la livraison d’une certaine quantité de sel au prix de l’impôt.

«< En bornant le prix dela vente à six sols la livre, il estime qu’on en retirerait g4arante-cinqg millions de revenu net ; et s'appuyant de tous les raisonnements qu’on fait en faveur des impôts sur les consommations, il regarde cette opération comme fiscalement, moralement et politiquement bonne. »

Ces deux projets, bien entendu, n'étaient pas les seuls qui soient parvenus au Comité des finances de la Constituante ; dans ses cartons nous avons trouvé, envoyé par un auteur anonyme, un autre Projet de remplacement de la gabelle !, dont voici les principaux passages :

« La suppression absolue de la gabelle doit, tôt ou tard, être prononcée. L'Assemblée Nationale n'a pu dissimuler cette consolante nécessité ; elle a manifesté qu’elle n’attendait que le vœu des provinces sur le remplacement de son produit pour lui porter le dernier coup. Il se peut même que cédant aux vives réclamations de la province d’Anjou, dont l’exemple a peut-être déjà été suivi par quelques autres, elle se décide d’hors et déjà à consommer la grande œuvre que les circonstances lui avaient seulement permis d’ébaucher.

« Mais en supprimant la gabelle, convient-il que le commerce du sel soit déclaré absolument libre dans tout le royaume ? N’est-il pas plus universellement avantageux que la nation retienne le privilège exclusif de la vente? Telles sont les discussions auxquelles un citoyen zêlé a cru devoir se livrer pour en présenter le résultat à l'Assemblée Nationale.

! Archives nationales, Comité des Finances. D VI. 4. 21.