La question du sel pendant la Révolution

ETS

« La liberté absolue du commerce du sel dans tout le royaume présente un double inconvénient à redouter : celui de l’accaparement et du trop haut prix.

« Le poids de ces considérations a fait penser qu’il devait être plus universellement avantageux pour tous les citoyens en général que la Nation retint entre ses mains le privilège exclusif de la vente du sel !, et que le prix en fut irrévocablement fixé pour toutes les provinces indistinctement à #rois sols la livre de seize onces, ou quinze livres le quintal.

« La fixation du sel à 3 sols la livre présente un avantage. Il ne serait pas possible de se flatter de le voir généralement à un prix plus bas si le commerce en était déclaré absolument libre; on devrait plutôt craindre dans ce cas de le voir porter beaucoup plus haut.

« Le bénéfice de la vente doit revenir à la nation. L'auteur prévoit une consommation annuelle de 4,231,060 quintaux, ce qui à 15 livres le quintal — produirait 63,465,900 livres, soit un bénéfice net d'environ 49 millions de livres par an.

« L'auteur ne se cache pas les résistances probables à sa proposition : il craint qu’on la déclare contraire à la liberté, ou que, plus simplement, les provinces franches et rédimées s’y opposent. En ce cas il préconise un droit d'extraction sur le sel, droit variable d’après les pays, et qui pourrait rapporter une quarantaine de millions. «Ce moyen, conclut-il, est beaucoup plus simple, mais on risque ainsi de faire augmenter le prix du sel au-delà de 3 sols la livre. » |

Ces propositions ressemblent beaucoup à celle d’une brochure intitulée Observations sur un projet de vente nationale du sel, présenté au Comité des finances *. Son auteur anonyme, tout en approuvant une vente nationale du sel remplaçant la gabelle, demande que les prix en soient gradués de un à cinq sous la livre, « et tellement organisé que les habitants d'aucun département ne se trouveraient dans le cas de payer le sel, dont ils s’approvisionneraient librement, qu’à des prix à peu près semblables à ceux auxquels les marchands

1 C'est le système qu’employent actuellement la Suisse, la Serbie, la Turquie, le Monténegro, la Chine et les Indes anglaises. Cf. Art Salz und Salzsteuer dans Handwôrterbuck der Staatswissenschaften, 2° éd. Jena, 1901, t. VI, p. 491, 496.

2 Archives nationales, G'/91.