La question du sel pendant la Révolution

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Le rapport de Dupont de Nemours, ainsi que les propositions des décrets furent vivement applaudis. L'Assemblée en vota l’impression. Dès le surlendemain, 13 mars, s’engagea la discussion sur ce projet de décret.

Le premier orateur qui prit la parole à ce sujet fut l’avocat Jérôme Pétion de Villeneuve, député du Tiers du baillage de Chartres, le futur conventionnel girondin. Après s’être déclaré d'accord avec l’article 1° du projet de décret, il demanda que les différences de provinces fixées par les articles 2 et 3 ne soient que provisoires, déclara que la fin de l’article 8 donnerait facilement lieu à des insurrections, enfin que l’article 9 permettrait à la ferme générale de vendre le sel à un prix arbitraire. Il proposa, en conséquence, de déclarer : que la répartition de grande et petite gabelle ne sera que provisoire ; que l’article 8 sera supprimé; de déterminer le prix du sel, et d’ordonner aux fermiers généraux d’en délivrer au prix qui sera fixé par l’Assemblée nationale.

Ces propositions venant d’un des hommes les mieux qualifiés de la Constituante sont très caractéristiques. Elles montrent bien le doctrisarisme qui les dicta : l'égalité devant l'impôt faisant partie de son programme, Pétion la préconise pour l'impôt de remplacement; et il est bon prophète sur ce point. Convaincu, d'autre part, que tout monopole amène une hausse des prix, il ne voit plus la situation particulière de la ferme sur le marché du sel, et il demande la fixation d’un maximum — qui sera voté — mais qui nulle part ne sera atteint, la vente libre du sel paralysant toute velléité d’accaparement. Il n'y a guère que la crainte des émeutes qui donne une note realpolitisch à ces amendements.

Le curé Jean-Joseph Bigot de Vernière, député du clergé de Saint-Flour, s'élève contre la proposition du comité des finances, qu’il déclare injuste, vicieuse et, surtout, dépassant les compétences des proposants. Il en demande le renvoi à ses auteurs.

Le maire de Romans, Claude-Pierre de Delay d’Agier, député de la Noblesse dauphinoïise, combat le projet de décret qui, dit-il, vend la liberté au lieu de la donner. II demande le monopole de la vente du sel, avec fixation du prix, pour la ferme générale. — II veut supprimer la fin de l’article5 à partir des mots: aux droits d'entrée des villes. ou lui epodieral la réserve: en proportion des revenus patrimoniaux. ET

L’orateur suivant est le chevalier Jacq AR d de