La Révolution française et ses détracteurs d'aujourd'hui

20 LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

cet ennemi de l’esprit de système, qui fut l'esprit de système incarné, cet ennemi de la politique métaphysique, qui juge tout en métaphysicien politique, c’est-à-dire d’après son idéal, à lui, d'organisation sociale, conclut intrépidement sur la timide Constitution bourgeoise de 1791 : « L’anarchie spontanée devient l'anarchie légale. Celle-ci est parfaite; on n’en a pas vu de plus belle depuis le neuvième siècle (1). »

Me voici arrivé, pour aujourd’hui, au cœur de mon sujet.

Contre Taine et ses disciples, j'ai prétendu et prétends que la Révolution — loin d’avoir creusé, entre la France d'avant 1789 et la France d’après, un abime, où elle aurait précipité tout ce qu'il y avait de sain, de fort, d'utile dans la société, — a aidé la France à se libérer de tout ce qu'il y avait en elle d'inutile, d’usé, de malsain, et à fonder l'ordre de choses vers lequel, trop lentement, mais consciemment, elle se dirigeait.

Bref, il n'y eut pas, comme je l'ai déjà dit, «rupture », mais continuité historique.

Il serait impossible de ne pas le voir, si:

1° Les passions aux prises ne faisaient encore beaucoup de fumée sur le champ de bataille où se heurtèrent, avèc une telle fureur, tant d'intérêts et de passions.

Et si, 2° l’œuvre accomplie de 1789 à 1795 n'avait pas été et dû être, — tant par le nombre

(1) La Révolution, t. I, p. 279.