La Serbie

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__ LA SERBIE

L'Etat serbo-croate-slovène en préparation

Les manifestations de la solidarité nationale à Zagreb

Les « Novosti » de Zagreb du 23 octobre donnent des détails sur les manifestalions qui ont eu lieu lors de la ”proclamation de l'indépendance yougoslave à Zagreb. Voici le discours important prononcé par le vice-président du Conseil National, Svetozar Pribitchevilch :

« Il est beau de vivre aujourd'hui, ear les fers qui nous enchaînaient se brisent. Nous sommes arrivés à l'heure où nous pourrons donner, libre essor à nos sentiments. Nous interprétons l'unité nalionale ainsi: le Croate sera Serbe, le Serbe sera Croate, tous les deux ensemble Slovènes, et tous les trois ensemble Yougoslaves. (Approbations frénétiques.) Nous flemandons là Yougoslavie libre, unie et indépendante, dans laquelle tous sont compris : et les frères de lPlsonzo, et ceux de la Mur, de la Drave, de la Save, de Ia Morava et du Vardar. (Approbations frénétiques.) Le Conseil National est à la tête du mouvement; il est le seul organe let notre seul souverain. Nos maux sont connus. Nous réclamons à présent des indemnités pour nos sacrifices: nous voulons la Jiberté absolue, Nous ne demandons pas ce qui est à autrui, mais Nous voulons être les maîtres dans notre maison, être solidaires avec nos frères. Vive Wilson, Vive notre Etat S. C. S. (serbo-croateslovène). » Li

Au nom de la Dalmatie, le Dr Mata Drinkovitch salua le public et déclara que notre concorde et notre union sont éternelles, à la vie et à la mort.

« C'est une heure solennelle: que celle où nous vivons. Remercions l'armée serbe qui a rendu possible que ce jour arrive. Les Serbes se sont fait tuer pour leur liberté et pour la nôtre, et les Croates pour celle des autres. Jurons que dès maintenant le frère n’attaquera plus son frère, mais qu'il combattra pour son propre sol. »

A ces mots, l'enthousiasme qui semr para de la foule devint indescriptible, Homimes et femmes, vieux et jeunes lèvent les bras. (une digne censurée) et prétent le serment de fidélité et de dévouement à la nation et à la patrie. Le Dr Drinkovitch continue : Lite

« Soyons dignes des souffrances .du passé. Viventles Serbes,héraos qui ont versé leur sang pour notre liberté; vive La Yougoslavie, créée par notre sang!»

Déclarations de M. Pribitchevitch

D'après le « Magyarorszag » du 27 octobre, le député Pribitchevitch, vice-président du Conseil National, à dit à propos du programme du Conseil National :

«Nous demandons l'union de la nation entière des Serbes, Croates el Slovènies, sur tout le territoire ethnographique ‘de cette nation, en un ÆEtat unique absoliment souverain, constitué d'après les principes fondamentaux de la démocratie politique et économique, Sans considération! des frontièers d'Etats et de provinces Yintérieur desquelles ce peuple "vit actuellement. Cet Etat comiprendrait non seulement les {erritoires de l'Autriche et de la Hongrie dans lesquels vit notre nation, mais aussi les territoires qu'elle habite en dehors de la mone rchiüe, cestà-dire la Serbie, la Macédoine Serbe, de même que le Monténégro. Notre point de vue est de réaliser celle union à la conférence internationale de la paix et d'être représentés à cette conférence. Nous repoussons de manifeste impérial du 17 boctobre, de même que nous Trepoussons ét Vavenir toute tentative de résoudre particllement notre problème national et de jui enlever son caractère international.

Dans la note américaine, à mon avis Wilson désire que nous soyons juges du procédé du gouvernement austro-hiongrois qui nous contenterait. Mais nous estimons inutile toute négocialion avec le gouvernement austro-hongrois, d’une ipart parce que nous considérons qu'il est exclu que les facteurs gouvernementaux actuels de la Monarchie puissent adopter sans condition le point de vue radical: de notre pro gramme, l'union de tous les Croates, Slovènes et Serbes, et d'autre part parce que les exigences territoriales de notre programme dépassent la compétence du gouvernement austro-hongrois, car le terme «en dehors » de la monarchié exige lim pérativement une solution internationale. Si nos demandes n'étaient pas résolues

par la conférence internalionale et Suivant nos intentions, une nouvelle source de troubles naîtrait en Eurcpe. L'Elal yougoslave, d'après les principes généraux et fondamentaux de la démocratie, assurera à toutes les minorités des autres nations un dévelcppement culturel.et national (libre, et garantira aux Etats voisins les voies commerciales vers les mers, à condition que cela ne touche pas Pintégrilé “territoriale et. la souveraineté de, l'Etat. -Ce sera l'affaire de la conférence de déterminer, sur la base de la réciprocité, kes mesures pour la-protection des minorités de langue étrangère. Nous garantirons par des traités la voie du libre commerce avec la mer et non pas la voie de quelque corridor. » Le Gonseil National à Wilson

La « Iirvatska Rijetch'», de Zagreb, publie, dans son numéro du 22 octobre, le communiqué suivant du Conseil National :

« Le Conseil National salue avec le plus grand enthousiasme le point de vue adopté par le président des Elals-Unis d’'Amérique, Wilson, dans sa réponse à la note austro-hongroise, et déclare: Le

La nation des Slovènes, Croates et Serbes, dans la déclaration -du Conseil National du 20 octobre relative à la solution de la question nationale, adopte le principe de la libre disposition nationale sans aucune condition. En conséquence elle considère le corigrès international de la paix comme le seul forum compétent pour la solution définitive de da question.

On a décidé d'entreprendre des démarches pour Le rétablissement des droits constilutionnels, surtout quant à la liberté de la presse et du droit de réunion.

Le Conseil Nationai invite la population de Zagreb et la nation entière à rendre

impossible — tout en donnant dans 5es manifestalions libre essor à sa joie let à son

enthousiasme — loute manifestation qui attenterait au bien d'autrui. Tout dommage causé par la population nuirait non seulement à la considération de notre eur ple à cette grande époque, mais pourrait aussi détruire des biens que nous devons considérer dès aujourd'hui comme appartenant à notre futur Etat des Serbes, Croates et Slovènes. »

La Serbie victorieuse

M. Ed. Chapuisat, directeur du Journal de Genève, écrit dans le numéro du 5 octobre de son journal :

Belgrade fait relour à son peuple. Envahie naguère par les troupes austro-hongroises el soumise at plus dur régime, elle reconquiert aujourd'hui sa liberté. Le commandant de la première armée serbe, chassant devant lui les Impériaux, à fait, le ler novembre, son entrée solennelle dans la capitale. :

La Serbie ressuscitée reprend peu à peu la place dont un puissant voisin tenta de lécarter. Hier encore fugitif, le roi Pierre rentre en vainqueur et entend monter, du fond de ce pays amoureux de légendes héroïques, les cantilènes célébrant son martyre et Isa gloire.

Ainsi s'écroule le rêve ambitieux de l’Autriche. En vain les Habsbourg tentèrentils de bousculer l’humble voisin qui leur barrait la route de Salonique. En vain mutilèrent-ils ses aspirations en annexant, en 1908, la Bosnie et l'Herzégovine sous les yeux même de l'Europe insouciante!. En vain lui fermèrent-ils l’Adriatique apres la guerre balkanique de 1912-1913. En vain, après avoir essayé d'en faire un Etat vassal du point de vue économique, $€ précipitèrent-ils sur elle, le couteau à la main, pour l'égorger.

En vain. Aujourd'hui les paysans tenaces et patriotes ont maté leurs adversaires et reprennent en chantant le chemin de leurs fermes et de leurs hameaux. Demain, du milieu des ruines surgiront de nouveau les « zadrougas », COOpÉratines familiales, où l’aieul demeure entouré. de ses descendants sur le sol qu'il cultiva.

Les peuples de la Yougoslavie; dont Ia résurrection de 1a Serbie hâtera la naissance, présentent une ‘unité ethnique, un art national commun, des traditions semblables ; d'autre part. les régions qu'ils occupent forment une unité économique con-

acte. L'Herzégovine, le Monténégro, le littoral de la Croatie, celui de la Dal-

maltie ne sauraient 5e passer de la Serbie, de la Bosnie et surtout de la Slavonie, pays fertiles qui les alimentent. ue Le problème national que la Serbie aura x résoudre au lendemain de sa victoire offre donc une base matérielle très sûre.

En constituant un Etat qui. devienne une entité économique homogène, en nouant des pays recouvrés en une seule nation, la Nouvelle-Serhie apportera à l'Europe une garantie de paix dans les Balkans et s'opposera, selon le vœu “exprimé par la jeunesse yougoslave, dans un important manifeste, à toute nouvelle poussée des Germains vers l'Orient.

Après avoir accompli glorieusement Sa tâche mililaire, la Serbie, on le voil, va trouver devant elle une œuvre considérable à accomplir au sein même de la nation. .

Grand et beau devoir, Ce peuple, dont toutes les légendes gravitent autour de héros se sacrifiant pour la justice et de champions de la liberté, restera fidèle à son passé, Le drapeau serbe qui flotte aujourd'hui au-dessus de Belgrade annonce au monde que Je crime, vaincu, roule dans l'abime de l'histoire et que la Serbie, victorieuse, s'apprête à donner au monde lexemple d’un peuple uni dans l'œuvre civilisatrice qui lui incombe.

La délivrance de Belgrade

Le Temps du 4 novembre écrit :

Voici que les Serbes sont rentrés dans cette ancienne ciladelle de Belgrade, d’où lon domine à perte de vue les plaines de la Syrmie et du Banat. Le 6 janvier prochain, il y aura cent douze ans que les insurgés serbes, conduits par le bisaïeul du roi Pierre ler s'emparèrent de la vieille forteresse qu’occupaient alors les Turcs. Dans le jardin en terrasse qu’on a arrangé sur l'emplacement des glacis, combien de patriotes sont venus rêver d'unité ‘nationale, de débouchés vers l'Occident où vers l'Orient, tandis qu'ils contemplaient la vallée du Danube, cette grande route des peuples. Mais les humbles maisons de la capitale serbe, des générations ont vécu repliées sur elles-mêmes, regardant de loin la terre promise, vibrant chaque fois qu'on parlait de droit et de liberté dans Île fmonde, travaillant à l’étroit pour un avenir qu’elles ne devaient point voir. Et maintenant après quatre années d'épreuves inouies, moins de deux m'ois après ce fameux discours d'Essen ‘où Guillaume IT disait aux bouvriers de Krupp que la Serbie était «finie», l'armée serbe rentre victorieuse à Belgrade et devant elle l'horizon est libre: la monarchie austro-hongroïse n'est plus. Quelle vengeance pour Îles soldats héroïques qui ont succombé pendant la retraite de 1915! Quelle épopée pour cette nation de cinq millions d’âmes!

De cette petite nation va naître un grand peuple. Depuis des siècles, les oppresseurs turcs, magyars et germaniques Se sont acharnés à diviser les Slaves du sud, pour les asservir en détail. Tous ces lexploiteurs de peuples se sont trouvés d’accord contre une race vaillante qui aimait Vindépendance et qui ne voulait pas oublier son passé. La défaite de l'Allemagne et l'effondrement de l’Autriche-Hongrie doivent marquer à jamais la fin de ce Systome odieux, Alors que tant d'hommes se sont fait tuer pour défendre les droits des peuples et pour fonder une paix dura ble. personne ne voudra ni ne pourra

« . 3 plus ressusciter en aucun coin de l'Europe, une politique d'intrigue où de spolation qui amènerait inévitablement. de nouveaux conflits. La souffrance endurée en commun a scellé l'unité yougoslave. La victoire doit la couronner.

La France et la Serbie

Le Président de la République vient de faire parvenir les télégrammes sur vants à S. M. le roi de Serbie et à S. À. R. le prince régent Alexandre:

Paris, 4 novembre. Sa Majesté le roi Pierre de Serbie, Salonique..

Au moment où la vaillante armée serbe rentre victorieusement dans votre capitale reconquise, je ne puis me rappeler sans une profonde émotion les années d'épreuve que viennent de vivre Votre Majesté et son peuple, d'abord les sombres journées de juillet et d'août 1914, où; après avoir essayé d'humilier la Serbie par un ultimatum arrogant, les puissances centrales se sont jetées sur elle sans l'apparence d'un prétexte et ont déchainé par cette agression la guerre universelle, puis, après une longue et heureuse résistance, marquée de brillants succès, l’écrasement fatal sous le poids du nombre, les aîffres de la retraite et les douleurs de l'exil; puis la reconstitution de l'armée serbe, sauvée avec le concours de la France, l’occupation de Salonique, la formation et le maintien de cette armée interalliée d'Orient qui a aujourd'hui si largement contribué aux défaites successives de la Bulgarie, de la Turquie et de l'AutricheHongrie, La victoire est enfin venue récompenser dla persévérance de Votre Majesté, la patriotique patience de son. peuple et la bravoure de ses {noupes. Au nom

Lundi 11 Novembre 1918 —

d Ns 42

de la France l'adresse à Votre Majesté

et à la Serbie mes ardentes félicitations, Raymond Poincaré, *

Paris, 4 novembre, Son Altesse ‘Royale le prince Régent Alexandre de Serbie, Belgrade,

Voici que sont arrivées pour la Serbie les heures de joie et de fierté 'nationales que Votre Allesse Royale a si longtemps attendues dans la sérénité de: Ja confiance et dans Vénergie de l’action Votre valeureuse armée est enfin payée de ses efforts, de son courage et de fses sacrifices, Vous avez vous-même la haute satisfaction de pouvoir vous dire que vous êtes de ceux qui n'ont jamais fléchi, ja. mais désespéré, et qui ont donné tout leur cœur pour assurer la revanche du aroit Je prie Votre Altesse Royale de recevoir mes vives félicitations pour elle €t pour ses troupes viclorieuises.

Raymond Poincaré,

Nouvelles de Serbie

Rtrocités bulgares

Quoique un mois soit écoulé depuis qu'ils ont signé la gonvention d’armistice, les Bulgares n’ont pas encore libéré nos prisonniers de guerre et internés civils serbes, Les troupes anglaises qui se dirigeaient vers Istip ont rencontré, à toutes les étapes, des groupes de prisonniers serbes travaillant sous la surveillance des soldats bulgares quoique ceux-ci fussent tenus de les mettre en liberté Une petite tie seulement des prisonniers et internés furent libérés ; encore durent-ils aller à pied, sans subsides, depuis les contrées Les plus élaignées de Bulgarie, jusqu'à nos frontières. Contrairement aux slipudations formelles de la Convention de La Haye «et à toute considération d'humanité, les Bulgares ont tué plusieurs de ces malheureux, sous prétexte qu'ils voulaient s'enfuir,

En Macédoine, les Bulgares accomplirent des atrocités sans nom. Le cas d’assassinat de Nikolas Andonowitch,- maire de Radovichté, dont des Bulgares tuèrent aussi le frère, le fils et la fille, caractérise leur façon sinistre de procéder. Les Yictimes furent odieusement torturées et les comitadiis bulgares déterrèrent le cadavre de Nikolas chaque fois que Sa famille l’enterra; finalement ils jetèrent les 105sements dans un puits. Tous ces abominaæ

tions sont imputables à un certain Niko-.

las Georgieff, avocat bulgare, qui. était désigné comme maire de Radovichté et avait crdonné que ces crimes fussent perpétrés. Le roi Nicolas et notre unité nationale

Le roi Nikolas a fait à la presse, d’après le « Petit Parisien » du 26 actobre, la déclaration suivante:

« Je remercie Dieu de m'avoir concédé la grâce de woir la réalisation de mon idéal: la Tlibération de la Yougoslavie; je l'entrevois déjà grande et éclairée, se développant dans l'esprit démocratique, digne de l'admiration des peuples civilisés et des hommes libres. Et, comime toujours, me voilà aujourd'hui avec vous et tout à vous! 3

La Yougoslavie telle que nous la concevons ne peut être que celle qui embrasse tous les Slovènes, les Croates et les Serbes.

Dans notre Monténégro, vous le savez, vivent de tout temps les meilleurs des Serbes et Yougoslaves.

Je désire que nous nous unissions et qu'en frères nous mous accordions dans une Yougoslavie confédérative où chacun gardera ses droits, ses institutions, sa religion et ses mœurs où personne n oser prétendre à une suprématie quelconque, mais où tous nouls SerONS ÉSAUX ; dans une Yougoslavie maternelle qui nous donnera à tous les mêmes avantages et envers laquelle nous aurons tous les mêmes obligations; dans une Yougoslavie où chacun de nous emploiera {ous 505 efforts pour qu’elle soit grande et prospère dans la Société des ‘peuples libres el civisr sés. »

D'autre part, M. Chotch, ministre .du roi Nikolas, à exposé dans le « Genevois ? du 19 octobre quelle est l'attitude du gouvernement de Monténégro dans la question d'union nationale. Voici ce que M. Chotch dit à ce sujet: ;

«Le Monténégro aspire à l'union awec ses frères opprimés tout comme avec Serbie. Cependant, il existe une divergence d'opinions à ce sujet entre le Monténésr et le gouvernement de Serbie. celui dans sa déclaration de Corfou, deman0° que le roi de Serbie soit «reconnt |, des Serbes, des Croates et des Slovènes : Le Monténégro, au contraire, demande 9% ‘dans lunion des Yougoslaves le PERS soit juge souverain. Pour nous, € est quement de cette manière que l'on pourTe arriver à ces formes idéales de L'or y sation d'Etat qui sont le but pour Jequ luttent les Alliés. » « ï

Nous publions ces deux ne semblent pas concorder,

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