La Serbie
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Faraissant tous les Lundis
| JOURNAL POLITIQUE MEBDOMADAIRE
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Genève, Lundi 27 Janvier 1919
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Suisse... Gfr. — paru
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Déplorables incohérences| Autour du pr
Les beaux discours prononcés à la séance d'ouverture de la Conférence de la Paix n'ont pas effacé l'impression pénible produite par
- fa décision des cinq grandes puissances de ne
pas accorder au Royaume des Serbes, Croates et Slovènes le. droit de se faire représenter à ja Conférence: Le Royaume des Serbes, Croates et Slovènes n'étant pas formellement reconnu, cette décision pourrait, à la rigueur, être défendue par des subtilités d'ordre juridique. Mais le Droit, pour rester ce qu'il est de par sa nature — l'ensemble des normes résultant de l'idée du juste et de l'utile, et réglant la vie réelle des individus et des nations — nedoit pas s'écarter du terrain des réalités. Or, c'est un fait incontesté et incontestable que le Royaume des Serbes, Croates et Slovènes existe. Tous les éléments constitutifs d'un Etat sont présents : les territoires, les sujets et le pouvoir organisé, et l'on ne peut pas supposer que ceux qui ont voté la décision en question n'en n'eussent pas connaissance. Les motifs de leur décision sont donc d'ordre politique. Un intérêt politique quelconque aurait prévalu sur tous les arguments de droit et d'équité. Nous ne savons pas quel est cet intérêt ét nous ne pouvons que déplorer que le premier acte de la Conférence ait été défavorable à notre peuple. Nous devons le constater d'autant plus que c'est, là, la seconde déception que nous avons éprouvée depuis l'écroulement de
: J'Autriche-Hongrie.
Tout le monde se rappelle, en effet, la dé-
“ claration du gouvernement italien reconnais--
sant les aspirations sudslaves à l'union nationale. C'était au mois d'octobre de l'année pässée. On se souvient également de la réponse du président Wilson à la dernière note autrichienne, réponse où il était dit que l'Amérique laisse aux peuples de la Monarchie le soin de.régler eux-mêmes leurs rapports avec l'empire austro-hongrois. Or, qu'est-il arrivé depuis lors? Au moment où l'armée austrohongroise se débandait, les Alliés conclurent un armistice qui tenait compte uniquement de la Monarchie des Habsbourg et dont les clauses étaient rédigées en corrélation avec le traité de Londres. Les puissances qui déclaraient sympathiser avec le mouvement national sudslave et se montraient prêtes à l'appuyer de toutes leurs forces, oublièrent de mettre en pratique ces promesses lorsque l'occasiôn se présenta. On connait les conséquences de cette politique incohérente : une occupation brutale des régions purement slaves par les troupes italiennes, un réveil dangereux de l'impérialisme italien et une excitation extrème parmi les populations slaves.
Une autre inconséquense caractérise l'attitude des Alliés dans la question de notre union nationale. Lorsque le Royaume de Serbie demända, bien avant l'écroulement de l'Autriche, que la Serbie et tout le peuple serbe, croate et slovène avec elle, soient reconnus comme alliés etqu'on reconnaisse au gouvernement de Serbie le droit de, représenter aussi, au point de vüe international, les autres parties, irrédimées.de notre nation, les Alliés ne donnèrent pas:suite:à cette demande. Aujourd'hui que la Serbie a réalisé son programme national ‘et s'est transformé en Royaume des Serbes, Croates et Slovènes, les Alliés, en vrais retardataires, admettent que la Serbie représente toute la nätion sudslave. La demande du gouvernement serbe était alors légitime, parce qu il n y avait, en effet que la Serbie qui pôt représenter au dehors cette partie de la nation qui était sous l'esclavage austro-magyar: Aujourd hui, les représentants autorisés de ce peuple délivré se sont associés à la Serbie, ils font effectivement cause commune avec elle; il est donc juste de les reconnaître et de les accepter à la Conférence. -
Les arguments de ceux qui entravent la réa
- DrOits Bauer, a parlé deyant un auditoire -qui-remplissuit-complètement la salle Dre-
lisation de notre unité nationale n'ont pu aller jusqu'à forcer la Serbie à reculer et à se séparèr même monentanérment de ses frères de race. C'est pourquoi on a eu recours à uné fiction. La conférence considère les délégués du Royaume des Serbes, Croates et Slovènes comme délégués de la Serbie, Eux se considèreront comme des délégués de toute la nation. Il paraît qu'on a dû trouver cet expédient pour couvrir quelque temps encore le mystère. Celui-ci sera bientôt éclairci, espérons-le |
E. M
Les déclarations du Dr Otto Bauer
Après Lichnowsky et Lerchenfeld, miuistres de Buviére à Berlin, c'est M. Otto. Bauer, secrétaire d'Etat aux affaires éuran-: gères de l'Autriche allemande, qui vient. de faire d'iutéressantes déclarations, Elles prouvent une fois de plus que l'attentat de: Sarajévo ne servit que de prétexte aux. Germano-Magyars pour mettre en œuvre leur conspiration contre la paix mondiule,
La Nouvelle Presse libre, du 15 janvier, donne un compte rendu de la séance du 14 courant, où le D' Bauer prit la parole:
« Le parti social-démocrate, dit la Presse, : a convoqué aujourd hui pour une première séance les cercies électoraux des Ier, 111me et Iiwe arrondissements, dans laquelle le | secrétaire d'Etat aux allaires étrangères, le
her. Trois comtes, dit l’orateur, Berchtold, Stürgkh et Tisza, et un général, Konrad von Hœætzendorf, ont travaillé, au mois de juin 1914, en pleine paix, à la rédaction d'un mémoire qui avait pour but de convaincre les empereurs François-Joseph et Guillaume de la nécessité de déclarer la guerre à la Serbie, vu les tendances séparatistes des Siaves du Sud. Ce mémoire n’est jamais parvenu aux destinataires. Peu après survint, en effet, l'attentat de Sarajévo qui rendu toute tentative de persuasion superflue, et il fut suivi de l’ultimatum adressé à la Serbie. Six versions différentes de l'ultimatum qu’on devait adressé à la Serbie furent repoussées. On s’en tint à une septième qui fut rédigée en des termes tels qu’on ne pouvait que présumer que la Serbie la jugerait inacceptable. »
De même que la Belgique fut la victime des manœuvres militaires des Allemands qui devaient aboutir à lécrasement de la France et du monde entier, la Serbie fut la victime de leurs manœuvres diplomatiques qui devaient aboutir à la guerre qu'ils avaient tant désirée. Nous nous réjouissons de ce que la vérité sur l'origiae de la guerre soit révélée aujourd’hui d'une façon aussi éclatante, mais nous, avec nos frères d'armes et de douleurs, les Belges, nous ne
_serons. p einement satisfaits que lorsque
les principaux coupables avec leurs com-
plices dans l’œuvre de destruction, seront
punis non seulement pour avoir provoqué . la guerre, mais aussi pour avoir fait inutilement des victimes, de la Belgique et de, la Serbie. Avant d'aborder les questions
d'ordre politique, la Gonférence devrait
d'abord se conformer aux exigences de la
justice en poursuivant tous Îles coupables
de cette guerre : ceux qui l’ont provoqué
ou qui l'ont faite contrairement aux règles
les plus élémentaires d'humanité. er
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k l'Institut de France
M. le comte Louis de Voïnovitch, auteur de nombreux ouvrages très appréciés sur la question yougoslave, vient d'obtenir le premier prix de « Drouyn de Lhuys » à l'Inelitut de France (Sciences morales et politiques) pour son ouvrage « La Monarchie française dans l'Adriati-
que».
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adriatique.
Depuis quelque temps, la question de la déiim'tation des frontières ita.o-yougosaves est devenua l’obj-t. de nombreuses discussions non seulement dans la presse itaienne mais encore dans toute la pressé
“alliée. Peu à peu, on arrive À poser le
problème d’une façon plus objective et Jon peut constater aussi que quelques organes italiens, notamment le « Corriere della Sera » ont pris un ton plus franc et ‘une manière plus ouverte, Nous tenons à enregistrer quelqu:s propositions concrètes sur la façon dont on pourrait tracer la fron'ière future entre l'Italie «et le Royaume des Serbes, Cioates et S!ovènes. Ces propositions sont loin de nous sa isfaire. mais cles powrai2nt servir de base à une discussion plus objective el pus conriliante. Dans la « New Europe » du 2 janvier, on peut lire un atice rmarq'able sur les, ligries pére d’un ærangement auteur de cet articie rappel'e que les territoires con'es'és sant situés dans les anciennes provinces autri- hennes de Goriza-Gradisca, Tr'este, Carnio'e, Istrie ‘et Dalmatie, La population de ces régions était répartie comme suit: ‘ Italiens Sudslaves
Goriza-Gradisca 90.009 164 564 Trieste : 118959 56.916 . Istrie | 147.417 223318 Da'matie 18.028 610.669 De ces chiffres, se dégagent les constatations suivantes: sm I. — La rive droite de l'Isonzo et une
bande de territoire sur la rive gauche jusqu'à Mon'falcone sont purement j'aliennes. La ville de Go‘ïza possède line majo. ié .iaienne (1400 Taïie:s €: 11.000 S_orènes): dans le reste de-la- provinoe, ji: n'existe pas même de minorité italienne.
II, — La ville de (Trieste, en dehors de ses 62% d’italiens natifs, héberge encore B0 à 40.0)0 Ilaïens émigiés du Royaume d'Italie qui accentuent davantage son caractère jtalien, Mais, il y a dans la ville une forte minorité slave de 25 à 30%, très amie du progrès, très fnstruite et bien organisée. Dès qu'on quitte la vile, les faubourgs £t les environs sont purement slovènes.
III, — Dans l’Istrie,-les races sont plus mêées, mais il est quand même poss.ble d'identifier deux zones: la zone occideniae où l’elément iaïen prévaut (129.903 Itaïens conire 533,3 Croaces et Siovènes) et la zone orientaie qui est presque exclusivement siave (135.200 Siovènes ei Croases et 66.6 Ilaiens). En d’autres termes, les Italiens dominent dans les viiles (de la côte, Pola, Capouistr'a, Rovigno, ec. tan&is que les dst.ics ruraux de l’mtérieur sonit incontes.ab:ement siaves,
IV. — En Dalmatie, les ItaKens forment une minorité négligeable de moins du 8% de la population, qui est purement serbo-croate, et celte minorité même
_est répartie dans une demi-douzaine de
villes, le long de Ja côte; seule Zara en
possède un. tie:s. Dans touies les îles dal-
mates, le nombre total des Itaïens ne s'élève même pas à un millier. :
V, — Si, à Ja ‘ville de Fiume, où fl y a 21212 Italiens et 15687 Siaves on ajoute le faubourg important de Susak,
la population est de 25.791 Italiens et
25.602 Slaves et toute la région environmane e:t presque exclusiviment croate.
L'auteur estime que la solution du. probième consiste à laisser le moins possible de minori.é: érangères dans.J’un ou l’autre pays et à trouver tn accommocdement entre l’ethnographie et la géographie, I.'es.im® que les vilus de Go.iza © d>: Triosta doïveni: être a.tribuées à l’Ila je, tandis que. pour l’Istrie, à faudrait arriver à un. coin-
omis. D'autre part, il suppose que les uds'aves me pouriont accepier aucun COmMDe au sujet de la Dalmatie et de iume, |
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Dans le « Corrïere della Sera » du 1er janvier, nous trouvons un art:c'e remarquable au sujet des confins orientaux de l'Italie nouve.le. L'article n'est pas signé; sa responsabilité incomie donc à la rédaction. Le «Corr'ere dela Sera» a eu trop souvent une attitude équivoque et si l’article mentionné représente sa véritable pen-
ue D
oblème italo-sudslave
sée, on doit reconnaître que de « Cormere », em metant de côte ia Daimatië et en répolauc la frontière itaenne bien au mnoru, @u isuie, a fait preuve d'une oué: auon appréeciabie en comparaison aes 1evemuicaaons des umpériasses 114liens. Uue fois 1a question ue 1a-Dalmatia éliminée, ie prop.eme des 1rontères devien veaucoup pius facile, Ma.heureusemeuf, awanc 4e « Correre dela Sera » se monte conciliant dans ia question de ia Daimate, autant ses prétent.ons en ce qui concerne J’isuie et rime sont exorjutan.es, En efez le « Corricre » défend mon seu.emenr .e tai.é d: Lonur.4S, mais Li reprocue aux auteurs de ce traié de m'avoir pas éendu Ja Hhontère de l'Italie jusqu'à riume, em y comprenant Ja vile ue riume. La seuie raison invoquée par lui en faveur de cette frontière, c’est La com'iguration géographique d’un cô.é, c’està-uiie le aéss d'avoir une front.èe marquée par ues montagnes et nOA pas pal la 1imi.e des hanizauons nationales, ec de l’autre, la possibiité d’aagloser dans le royaume d’iaie la vi.le de riume qui s8 trouve sit sa C.oafe. ; « Toute autre solution, écrit le 6 Corriere», me pourrait être qu'illogque et inqus.e. Surto.t, on ne peu accepta aucune propusi:0n tendant à faire prévaoir une rigiue interpréadon des crières wthuique ec linguisuque sur le principe dé l'unué géographique... Que jitalie doive avoir une bonue irontière, C'est La narcure qui le iui impose, c’est l’histoire qu l'en avertit, c'est ia jusiice et la paix qui le aemandent, Une irontière sol.de est la seule vériabie garant.e de l'équilibre, de la justice, de la 1iberué et de la paix pour L.s peur pes qu'eile SÉpAre, >» Lt “Sans entrer dans la discussion Aapprofoudie de ces arguments que nos lecteurs apprécieront eux-mêmes, nous tenons pourtant à rappeler que les directeurs et les rédacteurs du « Corriere » figurèrent au premier plan de ceux qui jorganisèrent Je Congrès de Rome d'avril 1913, et que ce Congrès vota dés résolutions inspirées par des arguments bien difiérents de ceux qu'invoque actuellement Le « Corriere aëlla Sera ». Du haut du Capitole, à Rome, on proc'amait, au mois d’avril 1918, que la véritable sécurité d’um pays résidait aans le respect des droits du voisin et que les frontières, loin de séparer les peuples, devraient plutôt être tracées de manière à les rapprocher. C’est le sens du principe des mationalités conçu au point de vue infernational et l’on ne peut que regretier que le « Corriere » aïît pu si vite oublier les paroles et les promesses faites au mois d'avril de l’année précédente. Dans le même journal müanais, numéro du 11 janvier, nous trouvons un auire arlice de fond t è; con il'aat dans la forme, mais soutemant la même thèse de la nécessité de frontières stratégiques. Cet article intitulé « L'unité indisso:uble de la Venise julienne » cherche À prouver qu'il m'y a que deux solutions extrêmes pour la délimitation de la frontière italienne orienta'e: oulafrontièredelIsonzo,
-ou la fromtière des Alpes julien-
mes. La Venise julienne, une appel'ation. purement artific'elle, devrait appartenir tout entière à l'Italie ow au Royaume sudslave, Le « Corriere » se prononce éner- : giquement contre la so'u'ion intermédiaire qui serait favorab'e à la répartition, 6 hmique de la population italo-slave, Il revient à son idée antérieure que des barrières maturelles doivent former les frontières entre Elats, sans égard à l’expansion des habitat‘ons nationa'es. Pour lui, lés fleuvés et les montagnes paraissent être des fétiches! A
À mo'er également, Vinci lent Bissola'i de l'interview accordée au « Morning Post ». M. Bissolati a expliqué dans cette interview que la cause véritable de ses disseur sions. avec le ministre Sonnino était. la question de la Dalmat'e et le problème des futures relations üitalo-sudslaves, M. Bisso'ati estime que la Dalmalie devrait revenir purement et simplement à la Yougoslavie et que l’Ita'ie devrait le reconnaître spontanément et sans y être ob'igée par la conférence de la paix. Il estime : en outre qu'une alliance avec le peuple sudslave “est. de valeur beaucoup plus grande pour l'Italie qu? la possesson des villes et des régions dalmates. Mais M: