Le Comité de salut public de la Convention nationale

HISTOIRE INTÉRIEURE DU COMITÉ DE SALUT PUBLIC 97

XII

Il n’était que temps pour les Dantonistes d'agir. À vrai dire, la partie n'était pas encore désespérée. Ils avaient pour eux tous ceux qui pensaient que la Terreur avait assez duré, puisque la République était victorieuse, et qui savaient que Danton voulait « rouvrir les portes des prisons, faire renouveler le Comité de salut public pour lui enlever son influence assassine, tirer la France de sa stupeur, et rendre aux bons citoyens la tranquillité et le bonheur (1) ». Son but, dit Garat, était « d'arriver enfin, ou par des mouvements gradués ou par un mouvement inattendu, impétueux, au renouvellement total ou partiel des deux Comités ». Un courant se dessinait en sa faveur : ainsi, dans la seconde quinzaine de mars, deux dantonistes, Tallien et Legendre, furent nommés l’un président de la Convention, l’autre président des Jacobins; et sur la demande d'un autre dantoniste, Bourdon de l'Oise, l’Assemblée ordonna l'arrestation du chef de la police robespierriste, Héron (2).

(1) Dubois-Crancé, Analyse de la Révolution française.

(2) C'est à ce moment de la lutte entre Robespierre et Danton, nous raconte M. Legouvé, dans Soirante ans de souvenirs, que son père fit jouer Epicharis et Néron. « Les deux chefs de la Montagne assistaient à la représentalion, Robespierre occupait une première loge d’avant-scène, Danton était à l'orchestre, et derrière lui s’échelonnaient tous ses amis. A peine le mot de Mort au tyran ! faut-il prononcé que, sur un signal de Danton, ses amis, éclatant en bravos frénétiques, se retournèrent vers Robespierre, et, debout, les poings terdus, lui renvoyèrent ce terrible cri de vengcance. Robespierre, pâle, agité, avançait et retirait sa pelile main d'homme d’affaires (je tiens le mot de M. Lemercier, témoin de la scène) comme un serpent allonge et retire sa tête plate et irritée... »

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