Le Comité de salut public de la Convention nationale

HISTOIRE INTÉRIEURE DU COMITÉ DE SALUT PUBLIC 407

de provoquer une comparaison qui pouvait être défavorable à la nouvelle ? L’une n’était qu’une suite d’allégories froides et obscures, tandis que l’autre plongeait ses racines dans les profondeurs des habitudes héréditaires. On aurait dû s’en tenir à la proposition de Billaud, et, au lieu d’avoir des visées religieuses, rester dans le domaine civique des fêtes nationales, des anniversaires héroïques et patriotiques.

On le vit bien à la fête du 20 prairial. Quoique nos armées fussent victorieuses; qu'après une année mauvaise, la récolte de 1794 s’annonçât comme devant être abondante; bien que David eût été l'organisateur de la fête, et qu'on n’eût rien ménagé pour la rendre superbe, elle resta froide et en certains endroits un peu ridicule.

Robespierre lui-même n’y gagna rien. Lorsque, au sommet de la Montagne symbolique qui s'élevait au Champ-de-Mars, on le vit paraître avec un immense bouquet de fleurs et d’épis à la main, et que, la Convention à ses pieds, il parla au peuple assemblé, il sembla à la fois pape et roi; la France et l'Europe, au récit de cette fête, virent en lui un maître. Les Montagnards ne s’y étaient pas trompés, et n'avaient pu retenir leurs menaces. «Le b... ! disait un sans-culotte, il n’est pas content d’être maitre, il lui faut encore être Dieu ! » Les représentants Thirion, Montaut, Ruamps, Duhem, Bourdon, Merlin de Thionville parlent de tyran, de Brutus. Lecointre dit de façon a être entendu de Robespierre : « Je le méprise et je le hais ! » Plus de vingt lois, il l'appelle tyran et dictateur. Robespierre, déconcerté par les injures qu’il entend ou devine, hâte le pas, les peureux le suivent, si bien que le retour de cette fête triomphale ressemble à une fuite.