Le drame serbe : octobre 1915 - mars 1916

LA DERNIÈRE ROUTE DE SERBIE 95

Serbie n’a pas été faite pour faciliter le commerce des hommes. La guerre seule a pu poser le sombre décor qui la borde. Cette route n'est pas une route. Elle est un calvaire, et le long de ce calvaire, j'ai vu se traîner tout un peuple,

Quand Belgrade fut pour tomber, un peuple entier reflua par la Morava, vers le quartier général, vers la capitale provisoire. Mais déjà Kragoievatz à son tour est menacé. Les Bulgares, par la trouée de Pirot, s’apprêtent à cerner Nisch. L’exode commence. Jusque-là on voyageait comme des êtres humains, dans des trains, dans des voitures, sur des chemins, Maintenant les lignes sont coupées, les chevaux privés de nourriture tombent dans les fossés, les routes se changenten bourbiers, Il pleut. A Belgrade, les fuyards ont dit : « Nous emporterons une malle ». À chaque nouvelle étape, il fallait alléger un peu le bagage. Des femmes qui furent riches vont maintenant à pied, Ilne leur reste plus qu'un ballot détrempé qu'elles portent sur le dos. Le ballot lui-