Le Monténégro contemporain : ouvrage orné d'une carte et de dix gravures

CHAPITRE DEUXIÈME. 117

de Sommières ! visitait le Monténégro, on n'y trouve encore aujourd'hui ni boulangers, ni bouchers, ni tailJeurs, ni cordonniers, ni menuisiers, ni serruriers. Les quelques individus qui, dans la principauté, se livrent à ces professions, sont des ouvriers dalmates ou albanais, établis temporairement ou appelés accidentellement dans la contrée, et souvent des déserteurs ou des vagabonds, justiciables des tribunaux militaires ou civils de leur propre pays, élément malsain quoique utile, ainsi que nous l'avons éprouvé nous-mêmes en bien des occasions.

Chaque famille fait ses propres récoltes, bâtit sa maison, confectionne sa charpente, moud son seigle et son maïs, fait son pain, tisse ses couvertures, confectionne ses vêtements. Et puis, les quatre murailles nues de l'habitation ne réclament ni les recherches de l'ébénisterie, ni le luxe des tapissiers ; souvent même le lit de repos n'est que le sol échauffé autour de l’âtre fumeux. Cette situation, perpétuée par la simplicité même du peuple, devient à son tour onéreuse à celui-ci, car il se trouve, pour les objets de première nécessité, tributaire immédiat de ses voisins, lesquels exploitent largement ses besoins. Aussi la plus grande partie des bénéfices que les Monténégrins retirent de la vente de leurs produits, va généralement enrichir les négociants de Cattaro ou de Trieste, qui expédient à prix élevé aux montagnards l'eau-de-vie détestable dont ils font malheureusement un grand usage, les denrées coloniales, les objets de quincaillerie et de mercerie les plus indispensables, les cordes, les planches, le fer, la coutellerie et enfin les cotonnades et les draps nécessaires pour le complé-

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PTE l Voyage historique et politique au Monténégro, Paris, 1820. 1.