Le Monténégro contemporain : ouvrage orné d'une carte et de dix gravures

132 LE MONTÉNÉGRO CONTEMPORAIN.

Voyez, dans un jour de fête, ce pope à la longue barbe blonde qui suit la rue de Tsettinjé, revêtu de la robe noire sur laquelle retombe la ceinture cramoisie, et la poitrine couverte de décorations : c'est Stevo Capicic, archiprètre de la petite capitale. Combien de fois, dans la dernière querre, ne l'a-t-on pas vu, les pistolets à la ceinture, le handjar dans une main et sa bannière dans l’autre, s'élancer en avant des gens de la Katounska pour leur montrer le chemin conduisant aux bataillons ennemis ! Si vous allez de Cattaro à Tsettinjé, saluez en passant le jeune capitaine des Niegouchi, Juro Pétrovitj. A douze ans il était sur le champ de bataille; enlevé par un Turc, sa tête allait tomber sous le Yatagan, quand un Monténégrin s'élance, tue le soldat ottoman et sauve l'enfant au péril de sa propre vie. Un jour que noté accompagnions le prince passant en revue le contingent des Bielopavitj, Nicolas I‘ s'arrête devant un jeunt homme dont la figure balafrée dans tous les sens altirait facilement l'attention. « Quel accident fa mis dans un pareil état? » lui demande le prince. « Gospodar, répond le soldat, j'étais à la guerre avee Mirko; c'est là que j'ai été blessé. » « Et quel âge avais-tu donc alors, car tu es à peine un homme. » « Gospodar, j'avais treize ans, » répond impassiblement le jeune héros: C'est aux longues veillées autour de lâtre que ces prouesses feront plus tard le sujet d'interminables ré cits; et quelle gloire, quand, dans un cercle où le prince lui-même viendra prendre place, le montagnard entendr& les vieux guerriers dire, en le montrant du doigt 4 chef du pays : « C'est un brave, il a coupé tant de têtes. » Qu'il soit un jour capitaine et toutes ses ambitions seront satisfaites.