Le Monténégro contemporain : ouvrage orné d'une carte et de dix gravures

382 LE MONTÉNÉGRO CONTEMPORAIN.

pris qu’il y avait plus de charme pour l'étranger à péné-. trer chez eux à travers les aspérités des rochers et les déchirures du sol, qu'à la faveur d’une route orqueilleusement suspendue aux flancs de leurs montagnes. Du moment que l'imprévu disparaît des coins les plus retirés du globe, et que la vapeur emporte jusque dans les nuages des légions de voyageurs aux factices enthousiasmes, ce sera peut-être une consolation et un attrait pour le touriste de savoir qu’à deux pas de l’Adriatique il pourra retrouver quelques-unes des émotions qui lui échappent aujourd’hui partout. Il devra donc garder aux Monténégrins quelque reconnaissance de l'oubli où ils semblent se complaire et de la parfaite sincérité avec laquelle ils répondent aux reproches qu’on peut leur adresser à propos de leurs routes : « On à toujours passé par là, pourquoi ne continuerait-on pas à y passer. » De Tsettinjé à Riéka ces reproches et cette réponse philosophique auraient lieu de s'échanger constamment entre l'étranger et son guide; car, à peine à une demi-lieue de la capitale, le premier, laissant à son cheval le soin d'exécuter pour son compte la périlleuse descente de Doborsko Sélo, n’a pas trop de toute sa prudence pour éviter lui-même les chutes où l'inexpérience de la marche dans les rochers pourrait à chaque instant l'entrainer. La route créée en 1869 entre Ricka et les Biélopavil}, très-praticable pendant l'été, est d'un parcours trèsdifficile pendant les saisons pluvieuses, car, n'ayant point été empierrée sur les points où elle traverse d'anciens champs, des bois ou des taillis, elle s’y transforme en véritables marécages où piétons et chevaux enfoncent à mi-jambe. Cet inconvénient se présente surtout à l'entrée de la plaine des Biélopavitj, dès qu'on arrive au