Le Monténégro contemporain : ouvrage orné d'une carte et de dix gravures

CHAPITRE QUATORZIÈME. 391

se fût moniré, dans l'exercice de ses fonctions, inepte, malhonnête ou prévaricateur, alors le bratsvo, de sa propre autorité, usant du reste d’un droit incontesté, déposait le délégataire indigne avant l'expiration de son mandat et, en assemblée générale, lui désignait un suecesseur dont les pouvoirs étaient de nouveau soumis à la ratification de l'autorité supérieure.

Quand l'importance d’une cause ou la gravité d'un crime ne permettait point au tribunal de famille d’accepter toute la responsabilité du jugement, l'affaire était alors déférée par lui au conseil suprême présidé, suivant l'époque, par le régent civil ou par le vladika. Et comme les juges du bratsvo devaient alors, ainsi que l'accusé et les témoins, se transporter au chef-lieu du gouvernement, il était interdit de prolonger le procès au delà d'une journée, afin qu'un personnel aussi nombreux ne fut point obligé de délaisser ses affaires particulières et de supporter des dépenses onéreuses.

Quelquefois aussi les chefs judiciaires des bratsvone, convoqués par le souverain, se réunissaient dans la capitale, pour y discuter des questions d'intérêt général, ou pour y recevoir des instructions spéciales; puis, de retour chez eux, ils transmettaient de vive voix à leurs concitoyens réunis en assemblée les décisions toujours respectées dont ils étaient les interprètes.

Pendant la longue période qui s’écoula jusqu'au moment où apparurent les premiers impôts, les juges n'ayant à attendre de traitement ni du bratsvo qui les avait élus, ni du gouvernement lui-même, étaient obligés de concilier leurs travaux de culture et toutes leurs occupations domestiques avec l'accomplissement de leurs devoirs publics. La perte de leur temps, la suspension de