Le Monténégro contemporain : ouvrage orné d'une carte et de dix gravures

CHAPITRE QUATORZIÈME. 395

demandait encore aux témoins, s'ils avaient quelque chose à ajouter et, sur leur réponse négative, donnait à tout le monde l’ordre de se retirer.

Les juges, après une réflexion sérieuse sur tout ce qu'ils venaient d'entendre, discutaient alors entre eux les assertions des deux parties, la valeur des dépositions des témoins et, s'il y avait des coupables, la quotité de l’amende à infliger à chacun. Étant tombés d'accord sur la sentence à prononcer, ils rappelaient les inculpés ou les plaideurs et l'assistance, et le membre le plus âgé du tribunal prononçait le jugement dans la forme suivante : « Après avoir tout examiné et tout pesé avec soin, nous avons reconnu qu'un tel est coupable, et nous trouvons juste qu’il donne à l'offensé telle somme, et qu'il paye en outre telle amende, dont le produit sera affecté aux usages ordinaires du pays. » Si la faute était de peu d'importance, le coupable évitait l'amende et n'avait à payer que les frais de justice ; dans le cas où deux plaideurs étaient à la fois condamnés, ils payaient tous deux une amende proportionnelle au degré de leur culpabilité. Quant au produit des amendes il était partagé équitablement entre les juges ; et, si quelque chef avait été convoqué par le tribunal dans l'intérêt même de la justice, ce membre adjoint percevait également sa part de l'amende, sans pourtant que le taux de celle-ci püt être élevé à raison de cette circonstance particulière.

L'amende ou les frais de justice devaient régulièrement être soldés en écus ou en ducats; mais comme la monnaie de toute espèce était rare chez le peuple, le tribunal acceptait la valeur de la somme due, soit en bétail, soit en grains, soit en toute autre denrée qu’on revendait équitablement, de facon à satisfaire également