Le Monténégro contemporain : ouvrage orné d'une carte et de dix gravures

CHAPITRE QUINZIÈME. 423

efforts combinés de son chirurgien et de ses amis pour hâter sa fin.

Dans toutes les affections fébriles, on commence par rouler le malade dans d’épaisses couvertures de laine, puis on le place sur une paillasse à côté de l’âtre où l'on alimente incessamment le feu ; et comme l'individu a de plus la tête, comme à dessein, entièrement exposée au rayonnement du foyer, c'est chose étrange qu'il ne succombe point d'ordinaire, sinon à sa maladie, au moins à une congestion cérébrale. Suffisamment rôti d’un côté, on le retourne de l’autre, tout en lui administrant de l'eau-de-vie, du vinaigre ou de l'infusion de pellina (sauge), dans laquelle ils ont la plus grande confiance, de facon à amener plus ou moins vite une sudation dont on tire les meilleurs présages. Nous avons oui dire, sans en avoir éié témoin nous-même, que dans quelques cas on enveloppait le malade dans la peau d'un mouton fraîchement écorché, toute fumante encore du sang de la victime. Autant le Monténégrin est indifférent à ses blessures, autant il s'effraye facilement d'une indisposition dont la nature lui échappe. Aussi dans les pays éloignés, il est encore d'usage, avant de faire venir le médecin, de transporter le malade à l'église, où quelquefois on l'abandonne pendant des journées entières, comme si le secours du ciel seul était capable de le ramener à la ‘ santé. Dans le cours d'une maladie chronique, pendant laquelle il n’a songé à recourir aux lumières de personne, on voit souvent le Monténégrin pris d'un désir subit de se faire traiter. Alors il commence à se plaindre, se met au lit, et, quelle que soit la saison ou l'heure, par la nuit la plus obscure et le temps le plus affreux, il envoie querir le médecin qui, se hâtant d’accourir, apprend quel-