Le Saint-Siège : l'Espagne et la France : le différend religieux entre Madrid et Rome, les mariages espagnols
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Le Cabinet des Tuileries attachait, non sans raison, un si grand prix à la conclusion rapide de cet arrangement que quelques jours plus tard, le 2 mars 1845, Guizot revenait à nouveau sur cette question dans les Instructions qu'il remettait à notre
nouvel Ambassadeur à Rome, Pellegrino Rossi (1). Insistant sur
(1) Rossr (Pellegrino), né à Cärrare, le 13 juillet 1787, assassiné à Rome le 15 novembre 1848. Professeur de droit pénal et de procédure civile à l’Université de Bologne, ardent partisan des idées d'indépendance et de liberté, compromis dans la tentative de Murat à laquelle il coopéra en acceptant les fonctions de commissaire civil dans tout le pays compris entre le P6ô et le Tronto, forcé de s’expatrier après la chute de Joachim, réfugié à Genève où il ouvrit des cours de jurisprudence appliquée au droit romain qui furent suivis avec tant de succès qu'il obtint, en 1819, le droit de bourgeoisie; fondateur, la même année, des Aurales de législation et economie politique, Député au Conseil cantonal en 1820, à la diète de Lucerne en 1832, auteur d’un projet de Constitution qui, adopté par cette Assemblée, ne fut pas sanctionné par le vote populaire, il concourut pour la chaire d'économie politique au Collège de France, rendue vacante par la mort de Jean-Baptiste Say et l'obtint (1833). Naturalisé Français et nommé professeur de droit constitutionnel à la Faculté de droit de Paris en 1834; Mémbre de l’Académie des Sciences morales et politiques en 1836, Pair de France en 1839, Membre du Conseil de l’Instruction Pu‘blique, envoyé à Rome en 1845 comme Ambassadeur et choisi par Guizot, qui lui avait voué une affection toute particulière, fait Comte par LouisPhilippe, rendu à la vie privée par la Révolution de 1848, il resta à Rome où, au mois de septembre de la même année, après les desastres de Lombardie, Pie IX, dont il était devenu l’ami et le conseiller, le plaça à la tête du Ministère. Il se proposait de développer les idées libérales tout en soutenant le Pouvoir temporel contre les partis avancés, lorsqu'il fut poignardé le 25 novembre sous le péristyle du Palais de la Chancellerie.
«Il nous fallait, écrit Guizot (Aémoires, tome vu, page 393), pour »porter devant le Pape la question de la dissolution en France de la So»ciété de Jésus, un homme nouveau, bien connu pourtant du public euro»péen et dont le nom seul fut un éclatant symtôme du caractère et de »l’importance de sa mission..Je donnai à M. de Latour-Maubourg le congé »qu'il demandait à raison de sa santé, et le Roï, sur ma proposition, nom»ma M. Rossi son Envoyé Extraordinaire et Ministre Plénipotentiaire »à Rome far interim. Ce qu'un tel choix avait d’un peu étrange était à »mes yeux son premier avantage. Italien, hautement libéral et réfugié “hors d'Italie à cause de ses opinions libérales, l'envoi de M. Rossi ne pou»vait manquer de frapper, je dirai plus, d'inquiéter la Cour de Rome. » Mais il y a des inquiétudes salutaires, et je savais M. Rossi très propre à »calmer celles qu'il devait inspirer en même temps qu’à en profiter pour »le succès de sa mission, Ses convictions libérales étaient profondes, mais »larges et étrangères à tout esprit de système et de parti. Il avait la pen-