Le système continental et la Suisse 1803-1813

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ses dépenses au strict nécessaire; les industries de luxe étaient frappées à mort; l’insécurité croissante des relations commerciales chassait le numéraire ; tout crédit disparaissait ; enfin, brochant sur le tout, l’ouragan de la lutte finale submergeait l'Allemagne, détruisant tout vestige de vie économique. Tous ces facteurs réunis portaient le dernier coup à la Suisse.

Le décret de Trianon, promulgué au mois d’août, avait arrêté net le brillant mouvement qui se dessinait au début de l’année à Leipzig; déjà la foire d’automne, tout juste médiocre, contrastait avec l'animation des affaires au printemps.

L'année 1811 marque la crise finale. À ce moment, la liquidation des marchandises immobilisées pendant le fatal hiver de 1810 à 1811 était devenue une question de vie ou de mort. Le soin tout particulier apporté à la préparation des foires allemandes, la qualité remarquable des produits exposés à Leipzig, le nombre inaccoutumé des maisons représentées, tout dénotait l'effort suprême tenté par les industriels suisses en Allemagne ?.

L’orage politique qui grondait à l'horizon réduisit à néant les espérances. La foire de Francfort échoua; elle fut suivie d’une débâcle encore plus complète à Leipzig*. L’énorme clientèle russe, à juste titre inquiète, n’osait se hasarder sur ce marché; les Allemands du sud, devant la menace des événements, avaient réduit leurs achats. Ces désertions avaient amené une dépréciation générale des tissus de coton. Un dernier incident vint compléter le désarroi: en pleine foire, le bruit se répandit qu’un convoi de marchandises

1 Allq. Ztg., 21 nov. 1810, Herbstmesse.

2 On signalait à Leipzig la présence de huit jeunes maisons inconnues jusqu'alors sur cette place et qui avaient probablement reporté leur activité sur l'Allemagne à la suite des derniers décrets impériaux en Italie.

Allg. Zig., A1 avril 1811, Handelschreiben aus St. Gallen ; — /d., 25 juillet 1811, Jubilatemesse.

3 Une maison de Bâle qui avait transporté à Francfort plusieurs centaines

de caisses de cotonnades n’en liquida que le quart à peine. Allg. Zig., # mai 1844.