Le système continental et la Suisse 1803-1813

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zuricoise; les fileurs des districts du lac se réservaient la préparation des numéros fins. Les autres rouets du canton, auxquels se joignaient ceux des bailliages argoviens et des petits cantons, fournissaient le reste. La troisième zone, moins étendue, comprenait quelques vallées argoviennes (Wynenthal, Seethal, Wiggerthal) dont les filés de qualité très ordinaire approvisionnaient les manufactures des bords de PAar 1.

La filature, qui constituait partout une ressource inestimable pour les classes populaires, eut sa plus belle période de prospérité vers 1760. A ce moment, elle travaillait non seulement pour le pays, mais aussi pour l’étranger. L’exportation, notamment celle à destination de la France, prit même, de 1780 à 1790, de telles proportions que quelques gouvernements cantonaux craignirent un renchérissement des filés nuisible à l’industrie indigène ?. Mais c’était le chant du cygne. Vers 1790, les premiers produits mécaniques anglais pénétraient sur le continent. Dès lors, ce sont des plaintes constantes sur l’envahissement du marché par larticle britannique au détriment de l’ouvrier suisseÿ.

L'apparition des filatures mécaniques dans le pays vient

1 Il existait aussi en Suisse orientale, dans la vallée de la Kander (canton de Berne) et dans la principauté de Neuchâtel quelques vestiges de filature du coton à la main, mais sans importance générale pour le pays.

Voir pour la filature à la main en Suisse : Atlas, p. 1770 ; — WartmannSeippel, p. 1 ss; — Wartmann, p. 150 ss.

2 Les gouvernements de Zurich et de Saint-Gall notamment, défendaient toute exportation de filés de coton. Cette interdiction demeura du reste sans. effet.

Bürkli, Fabrikgesetzgebung (1786), p. 31; — Wartmann, p. 129.

3 En 1786, le prix d’une livre de filés à la main était de 8 gulden. Il tomba de 2 gulden à la première apparition des produits mécaniques anglais, en 1790. Au mois de juin 1797, le journal du Toggenbourgeois Näbis Uli dépeignait de la manière suivante la crise provoquée dans la vallée de la Thour : «Nos marchands de filés et nos fileurs souffrent beaucoup... La cause en est la grande quantité de filés anglais qui entre dans le pays. Il en pénètre plusieurs centaines de quintaux dans le canton d’Appenzell et le. Toggenbourg par la voie de Saint-Gall, à bien meilleur marché que nos filés indigènes. Nous devons de ce fait vendre nos produits 2 à 3 gulden moins

cher que s’il n’arrivait point de filés anglais... Les fabricants et les maîtres tisserands retirent un grand bénéfice de ces prix avantageux, cela est vrai,