Le système continental et la Suisse 1803-1813

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mêmes ou par leurs correspondants des entrepôts dans les villes hanséatiques, dans le Holstein, en Hollande et dans plusieurs parties de l’Allemagne, se sont efforcés de transporter en Helvétie leurs magasins, depuis que partout ailleurs des tarifs ou des lois prohibitifs sont uniformément établis. Toutes les routes d’Allemagne sont encombrées de ces marchandises, qu’on fait passer en Suisse, et les expéditionnaires vont jusqu'à doubler et tripler les prix de transport pour augmenter le nombre des envois.

On a particulièrement remarqué que les cotons d'Amérique, les «Twists» ou «Fils de coton» débarqués dans les premiers mois de cette année ou jetés en contrebande sur les côtes de la Baltique, ont été successivement dirigés vers la Suisse, que les commissionnaires établis dans les principales villes d'Allemagne, craignant le séquestre des marchandises de fabriques anglaises et des denrées coloniales, font prendre la même direction à celles qu’ils avaient déjà dans leurs magasins, qu’ils les adressent principalement à Bâle, Berne, Zurich, Winterthour et Schaffhouse. La maison des frères Mérian de Bâle s’occupe avec plus d’activité que toutes autres de ces expéditions. Je joins ici la liste qui m’a été envoyée par mon gouvernement, des négociants suisses auxquels des envois de coton, de fils de coton anglais, de marchandises et denrées coloniales continuent d’être habituellement expédiés par leurs correspondants d'Allemagne, surtout par ceux de Leipzig et de Francfort.

Toutes ces marchandises ne proviennent pas de prises faites par les corsaires et de ventes de cargaisons confisquées. On regarde la plupart de ces expéditions comme le résultat d’un concert frauduleux entre les négociants anglais et les facteurs qu’ils ont sur le continent. Les envois se font en général pour le compte de ces négociants, et ceux-ci recueillent en dernier résultat les principaux avantages de cette contrebande, qui se fait en Suisse avec plus d’activité que partout ailleurs, quoi qu’elle y soit prohibée par les lois.

Il n’est pas possible que cet ordre de choses subsiste plus longtemps. La Suisse doit marcher dans le sens des pays qui l’environnent, et les mêmes mesures doivent y être mises à exécution.