Les états généraux en France

882 LES ÉTATS GÉNÉRAUX EN FRANCE.

puisse faire entre le temps du roi Jean et le nôtre est peut-être celui qui a trait à la question qu'on a appelée celle de « Paris capitale, » et que, pour éviter les malentendus dont on abuse toutes les fois que cette question se pose, nous appelons d’un autre nom : « Paris, siége du gouvernement et des assemblées.» Nul ne songe à chercher pour la France une autre capitale que Paris. Cependant, instruits par toute notre histoire, nous croyons non-seulement qu'il est à propos de maintenir actuellement hors de Paris le siége du gouvernement, mais qu’il serait prudent et sage d’en prendre irrévocablement son parti, et de tout faire en vue d'organiser notre Washington, en le corrigeant dans ce qu’il a de défectueux et d’incomplet. On se plaint parfois des inconvénients qui résultent du séjour de l’Assemblée nationale à Versailles ; de la perte de temps qui en résulte; du retard qu’en éprouve la solution de certaines affaires urgentes, et aussi de cet à-cheval perpétuel, de cette vie en chemin de fer à laquelle sont condamnés les hommes de bureau, les employés, petits ou grands, de nos ministères. Tous ces inconvénients sont réels. Mais nous sommes bien plus frappés, après Le 15 mai 1848, après l'insurrection de juin de la même année, qui faillit réussir, après la Commune qui a momentanément réussi, après bien d’autres journées qu’il serait trop long de rappeler, — du danger qu'il y aurait à livrer de nouveau la représentation nationale aux pressions et aux passions de deux millions d'hommes agglomérés; aux entraînements de ce Paris, aujourd’hui tranquille, mais qui demain sera peutêtre affolé, et qui, aux jours où il nous promet la liberté, nel sait jamais nous donner que la révolution. Cela résulte, non de sa nature, mais des conditions mêmes dans lesquelles il existe, travaille et s’agite. Autre doit être le séjour de l'artisan, de l’ouvrier, autre celui de l’homme de réflexion et d'étude, — homme de peine, lui aussi, quoique la tâche diffère, — auquel il appartient de nous donner des lois.

Dès le roi Jean, ceci fut compris. Les trois ordres tombent d'accord pour déclarer qu’ils n’enverront plusde députés à Paris, et le régent soustrait les États à l'influence de la plèbe parisienne, en leur assignant Compiègne comme lieu de rendez-vous, «dont ceux de Paris, » disent les Grandes Chroniques, « furent moult courroucés, mais la plus grande partie de toutes les autres villes en avaient grand joie. » On sait qu'alors le peuple s'appelait le commun. La Commune de Paris, — après cinq siècles, le mot reste le même.et aussi la chose, —— tombe en discrédit et en impuissance, privée qu’elle est de la présence des députés. Deux cent cinquante ans s’écoulent, — de Jean le Bon à la minorité de Louis XIII; de 1358 à 16414, — avant que Paris redevienne le siége des États; et rien ne prouve, bien