Les Cahiers des curés : étude historique d'après les brochures, les cahiers imprimés et les procès-verbaux manuscrits

LA LUTTE ECCLÉSIASTIQUE 219

les lois qui garantissent au souverain son autorité, aux sujets leurs propriétés, leur liberté et leur vie : ils s’opposeront à tout ce qui pourrait être proposé de contraire. »

La recommandation générale, par laquelle s'ouvre le Cahier, est encore rédigée à double entente, de façon à empêcher les opposants de laisser éclater l'indignation dont leurs cœurs sont pleins : « Par respect de la religion autant que dans l’intérèt publie (art. 1er), on doit faire un devoir aux députés de porter aux États généraux tant de sagesse, de prudence, de modération, que toute occasion de jalousie, de trouble, de division, puisse être écartée d’une assemblée où l'esprit de paix et de concorde doit être le garant du bien que la nation en attend. » (1)

La discussion publique du Cahier occupa de longues séances. Les curés refusèrent d'y laisser ce à quoi tenaient les évêques, et les évêques ce à quoi tenaient les curés.

Le 27 mars, notamment, une motion du curé de NotreDame — l’ancienne, de Poitiers, Guilleminet, sur l'augmentation de la dotation des cures, tombait, sans avoir été mise aux voix ni inscrite au procès-verbal, de par la volonté religieusement souveraine du vieil évêque président, Monseigneur Martial-Louis Beaupoil de Saint-Aulaire.

Ce que le curé Guilleminet dénonçait immédiatement à Necker: « Il est aisé de juger actuellement que, tant que les évêques présideront nos assemblées, on ne pourra jamais remplir les vues pleines de sagesseet de bonté du monarque bienveillant qui nous gouverne, et que nous ne pourrons jamais lui faire connaitre les maux et les besoins d'un peuple qui lui est cher. L’égoïsme et les prétentions orgueilleuses (des membres du haut clergé noble) leur feront toujours préférer leur intérêt particulier à l'intérêt général et mettront un obstacle presqueinvincible au zèle ardent qui

(1) Arch. parl. &. N, p. 388-399.