Les complots militaires sous la Restauration, d'après les documents des archives

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vous a révélé le nombre et la nature des preuves qui doivent faire fléchir la balance où se pèsent la vie et la mort des citoyens? Et pourquoi anticiper ici, avec tant de chaleur, sur un moment dont l'approche devrait vous plonger dans une religieuse tristesse ?

« Bories n’échappera pas, | dites-vous? Pourquoi prophétiser l’échafaud avec tant d’assurance ? Vous énoncez votre opinion comme si les opinions du ministère public n’avaient pas succombé plus d’une fois dans cette enceinte... En ce jour aussi, les prédictions du ministère public resteront vaines, je l'espère ; et l’accusé sera sauvé; j'en atteste la conscience de messieurs les jurés, etc. »

Le dernier jour des débats était arrivé (5 sept.) .Le président demanda à chacun des accusés s’il avait quelque chose à ajouter à sa défense.

Bories se leva, Lui dont on n’avait rien obtenu pendant l'instruction, et dont l'interrogatoire n'avait compromis personne, voulut pousser le dévouement jusqu'au bout, et s’immoler pour sauver les autres.

« Messieurs, dit-il en s'adressant aux jurés, M. l’avocat général n’a cessé de me présenter comme le chef du complot. Eh bien! j'accepte; heureux si ma tête, en roulant sur l’échafaud, peut ‘sauver celle de mes camarades! »

Ces paroles excitèrent sur le banc de la défense et

dans l'auditoire un mouvement de pitié mêlé d’effroi.