Les complots militaires sous la Restauration, d'après les documents des archives

LES QUATRE SERGENTS DE LA ROCHELLE 241

Mérilhou saisit son client dans ses bras, le force à se rasseoir, et d'une voix altérée :

« Messieurslesjurés, ces accents sontnouveaux dans cette enceinte, où d'ordinaire les accusés luttent entre eux pour conserver la vie, et non pour se la sacrifier les uns aux autres. Je ne sais quel sentiment ce spectacle a pu soulever au fond de vos cœurs. Quant à moi, attendri et troublé par mille pensées diverses, je ne puis que vous dire que celui-là est digne de conserver la vie qui ne craint pas de l’offrir pour ses frères d’armes et qui demande à sceller de son sang leur innocence et leur salut.

« Mais vous, ministres de la loi, vous n'êtes pas ici pour sanctionner par votre suffrage l’exaltation de l'amitié... Vous êtes ici pour faire bonne justice à tous et juger chacun selon ses œuvres.

« Et vous, Bories, de quel droit venez-vous ici détourner l’ordre de la justice et faire violence à la nature? Vos jours ne vous appartiennent pas: ils appartiennent à la loi qui seule peut en disposer ; laissez faire cette loi qui vous protège, cette Providence qui veille sur vous... Vivez, Bories, vivez pour entendre du président de cette Cour cette déclaration d'innocence qui doit briser vos fers. Vivez pourrépondre au ministère public par une vie utile et honorable, soit que le devoir vous appelle encore dans les combats,

soit que vous rentziez dans la vie privée. Vivez pour 14