Les fêtes et les chants de la révolution française

APPENDICE. 289

que cette coïncidence paraisse au premier abord, elle est loin d’être impossible. Les strophes de Desorgues pouvaient être dans la même coupe que celles de Chénier, par la simple raison que celles de Chénier étaient semblables à elles-mêmes dans presque toutes ses productions, depuis son Chant du 14 Juillet remontant à quatre années en deçà jusqu'à l’'Hymne à la Liberté des fêtes de 1793 : c'était en quelque sorte une forme consacrée, et Desorgues à pu l'adopter tout naturellement. S'il en était ainsi, Gossec aurait donc composé son chant du petit chœur sur les nouveaux vers; puis, s'apercevant qu'ils étaient d’une coupe semblable à ceux de Chénier, il aurait essayé de les leur substituer dans le grand chœur.

L'examen de l'adaptation va nous montrer le bien fondé de cette hypothèse. Qu’apercevons-nous d’abord? Pour la première strophe, l'adaptation s'opère sans difficulté. A la seconde, où la musique de Gossec, parfaitement d'accord avec les vers de Chénier, est d’un ton plus sombre, elle est déjà moins heureuse; pourtant cela peut encore aller. La troisième strophe musicale est la répétition de la première : le sentiment de l’ode de Desorgues ne variant pas, l’adaptation se poursuit sans encombre. Mais à la ouatrième strophe tout change : la musique de Gossec, très directement et intimement inspirée par les vers de Chénier, a ici, nous l'avons dit, le caractère d’une malédiction. Les vers de Desorgues, en leur insignifiance, ne peuvent s’accorder avec une musique si fortement accentuée. Quel parti reste-t-il donc à prendre à Gossec? Le plus radical : couper. En effet, tandis que, dans le matériel primitif, les parties vocales ayant conservé les vers de Chénier, ainsi que les parties instrumentales, donnent la musique de cette quatrième strophe, elle a disparu dans les parties ayant les vers de Desorgues. Au reste, en cet endroit de l'hymne, ce n'est pas seulement la musique qui subit des coupures : la quatrième strophe double de l'hymne de Desorgues (7° et 8e du petit chœur), ne pouvant s’accorder d'aucune facon à la musique du grand chœur, disparaît également dans ce premier essai d'adaptation. Enfin arrive la dernière strophe, en mouvement de marche guerrière. Cette lois la musique

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