Les hommes de la Révolution

— 110 —

où l'étourderie de Camille apparait le mieux, c'est à la mort de Mirabeau. Le premier jour, il ÉCHES:

« Mirabeau se meurt. Mirabeau est mort ! De quelle immense proie la mort vient de se saisir ! J'éprouve en ce moment le même choc d'idées, de sentiments, qui me fit demeurer sans mouvement et sans voix devant cette tête pleine de systèmes, quand j'obtins qu'on me levât le voile qui la couvrait, et que j'y cherchais encore son secret, que le silence de la mort ne gardait pas mieux que la vie... Cette tête semblait vivre encoré, et avait conservé tout son caractère ; c'était un sommeil, et ce qui me frappa du delà de toute expression, telle on peint la sérénité du sommeil du juste où du sage. Jamais je n'oublierai cette tête glacée, et la situation déchirante où sa vue me jeta. Mirabeau est mort en odeur de patriotisme. »

Et dès le lendemain, c'est une autre antienne :

« Lorsqu'on m'eut levé le drap mortuaire, à la vue d’un homme que j'avais idolâtré, j'avoue que je n'ai pas senti venir une larme, et que je l'ai regardé d'un œil aussi sec que Cicéron regardait le corps de César percé de vingt-trois coups. Je contemplais ce superbe magasin d'idées, démeublé par la mort: je souffrais de ne pouvoir donner des larmes à un homme, et qui avait un si beausgénie, et qui avait rendu de si éclatants services à sa patrie, et qui voulait que je l'usse son ami. Je pensais à cette réponse de Mirabeau mourant à Socrate mourant, : À SA réfutation du long entretien de Socrate sur l'immortalité par ce seul mot: Dormir, Je consi-