Les hommes de la Révolution

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late dans une de ses lettres à Lucile, cet état d’esprit: « J'ai découvert une fente dans mon appartement; j'ai appliqué mon oreille; j'ai entendu gémir; j'ai hasardé quelques paroles, j'ai entendu la voix d'un malade qui souffrait. IL m'a demandé mon nom, je le lui ai dit. «O mon Dieul» s'est-il écrié à ce nom en retombant sur son lit, d'où il s'était levé, et j'ai reconnu distinctement la voix de Fabre d’Eglantine. « Oui, je suis Fabre, m'at-il dit; mais toi ici! la contre-révolution est donc faite?» Nous n'osons cependant nous parler, de peur que la haine ne nous envie cette faible consolation, et que si on venait à nous entendre, nous ne fussions séparés et resserrés plus étroitement. »

Envoyés devant le tribunal révolutionnaire sur le rapport de Saint-Just, les Dantonistes se virent accusés d'un tas de méfaits qu'ils ignoraient et auxquels ils étaient absolument étrangers. On les avait mis pèle-mèle dans un vaste complot où des gens comme Chabot et Lacroix étaient accusés de vol, ou d’autres comme Philippeaux payaient leur courage et leur audace. Les jurés avaient été soigneusement choisis (1). Le fameux Herman présidaït. (1) Camille avait vainement récusé le luthier Renaudin, On verra tous les détails de ce procès dans notre volume sur Danton. Disons que, malgré tout, les jurés étaient indécis, Il y avait là, cependant, des «solides » entre autres, le fameux Leroy, dit Dix-Août. qui était sourd et condammnait sans. entendre, Un juré pleurait, Souberbielle lui dit: «Lequel est le plus utile à la République de Robespierre ou de Danton? — C’est Robespierre, — Eh bien! il faut guil. lotiner Danton. »