Les hommes de la Révolution

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rien écrit de sérieux et de durable, rien tenté, rien entrepris Heureusement, on était à la veille de la Révolution et le jeune avocat allait pouvoir faire son entrée en scène sur le théâtre du Palais-Royal.

On sait quelle était la situation de la France à ce moment-là, c'est-à-dire le 12 juillet 1780, deux jours avant la prise de la Bastille.

Malgré des résistances acharnées et sournoises, le roi s'était vu dans l'obligation de réunir les Etats généraux. Le peuple venait, à différentes reprises, de manifester son existence et sa volonté. Le tiers état luttait contre la volonté royale et menaçait de triompher. Mirabeau (1) lançait sa fameuse apostrophe à M. de Breré. Sièyès publiait sa brochure sur le tiers état. La rue s’agitait. Les bataillons suisses et allemands, appelés par Louis XVI, s’apprêtaient, dans le silence, à la répression. Il y avait des menaces dans l'air. Brusquement, le 12 juillet au soir, une nouvelle parvint à Paris. Necker, le ministre populaire, venait d’être renvoyé. Aussitôt ce fut une rumeur. On s’assemble au Palais-Rovyal. Des orateurs s’improvisent, grimpent sur les bancs, haranguent une foule curieuse et haletante. Au nombre de ces orateurs, on peut distinguer un jeune homme, dont la main levée tient un pistolet, et dont les yeux lancent des éclairs. Ce

(1) D'après Camille Desmoulins, qui assistait à la séance, voici ce qu'aurait répondu Mirabeau: «Le roi peut nous faire égorger, diteslui que nous attendons tous.la mort, mais qu'il n’espère pas nous séparer que nous n'ayons fait la Constitution. »