Lord Castlereagh et la politique extérieur de l'Angleterre de 1812 à 1822

LORD CASTLEREAGH ET LA SECONDE RESTAURATION. 99

de Marienbourg. Le chiffre de la contribution de guerre imposée au gouvernement français et payable dans le délai de cinq ans fut élevé à 700 millions. Un corps de cent cinquante mille hommes, formé de contingens pris dans les diverses armées alliées et entretenu aux frais du trésor français, dut occuper pendant irois ans au moins, et cinq ans au plus, dix-sept de nos places fortes. Enfin le gouvernement du roi s’engagea à faire liquider, par une commission mixte et une commission d'arbitrage, toutes les réclamations qu'élevaient contre la France, par suite des événemens des vingt-cinq dernières années, les sujets des puissances coalisées. Bien qu’on ne prévit pas alors l’'énormité de ces réclamations, la somme des sacrifices pécuniaires que ces stipulations diverses faisaient peser sur notre trésor était de nature à effrayer l'imagination. Le chancelier de l'échiquier doutait que la France pût y suffire, ses finances lui paraissant être tombées dans un tel état de ruine et de confusion, qu’il ne pensait pas que de longtemps elle fût en mesure d’acquitter les 5 ou 600 millions auxquels on évaluait alors son budget annuel. Les ministres allemands, les Prussiens surtout, témoignaient à cet égard plus de confiance; mais il n’est pas bien certain que cette confiance fût sincére, et qu'elle ne cachât pas la secrète espérance que la France, en n’accomplissant pas ses engagemens pécuniaires, fournirait un prétexte de prolonger l’occupation de son territoire,

* Un des collègues de lord Castlereagh, lord Bathurst, lui écrivait que sans doute il était bon de régler le mode de paiement sur un pied qui le rendit aussi praticable que possible, mais qu'il fallait pourtant le faire peser assez lourdement sur les ressources de la France pour que les puissances trouvassent dans son épuisement une garantie du maintien de la paix.

Lord Liverpool, pensant que peut-être le gouvernement français aurait l’idée d'offrir au cabinet de Londres des cessions coloniales pour s’exonérer de la part de la contribution de guerre qui devait revenir à l’Angleterre, avait recommandé à lord Castlereagh de ne pas prendre l'initiative de cet expédient. On devait désirer, disait-il, que la France conservât quelques possessions au-delà des mers pour qu'elle eût quelque chose à perdre en cas de nouvelle guerre maritime. Si cependant le gouvernement français faisait lui-même cette proposition, il ne fallait accepter ni la Martinique, ni la Guadeloupe, qui, malgré leur richesse commerciale, n’avaient, à cause de leur position topographique, aucune importance pour l'Angleterre; les Saintes en auraient davantage, mais la France tenait à les garder; Pondichéry et Chandernagor étaient trop insignifians; Bourbon, à défaut de port, avait d’excellens produits en coton et en café; Cayenne, sans valeur en ce moment, pourrait en acquérir par la suite: mais ce