Lord Castlereagh et la politique extérieur de l'Angleterre de 1812 à 1822

k LORD CASTLEREAGH ET LA COALITION EUROPÉENNE.

juger avec plus d’indulgence, à lui tenir compte de l’entrainement des éirconstances souvent impérieuses dans lesquelles il se trouvait placé, et à reconnaître qu’en bien des conjonctures il a montré autant de modération et de sagacité que d’habileté et de vigueur. Il est bien entendu que je parle uniquement de ses actes diplomatiques, dont l’exposé, seul objet de ce travail, nous permettra d'étudier la politique extérieure de la Grande-Bretagne dans une des périodes les plus curieuses de son histoire.

L.

Au commencement de 1813, le cabinet tory, formé, après la mort de Fox et la retraite des whigs, des débris du ministère de Pitt, comptait déjà près de six années d'existence. Successivemeñt présidé par le duc de Portland, par M. Perceval et par lord Liverpool, il avait vu s'opérer dans son sein des mutations assez nombreuses, dont

derniers volumes, les seuls qui doivent nous occuper en ce moment, contiennent de nomYreux documens relatifs aux dix années pendant lesquelles lord Castlereagh a exercé les fonctions de principal secrétaire d'état pour les affaires étrangères, de 1812 à 1822. L'éditeur, qui n’est autre que le marquis de Londonderry, frère et héritier de l’illustre homme d'état, nous apprend, pour expliquer ce qu’il y a d'incomplet dans cette publication, que les papiers dont elle se compose, retenus longtemps sons les scellés, lui ont été remis dans un état de désordre et de mutilation auquel il ne ui a pas été possible de remédier. 11 ne paraît pas d’ailleurs que lord Castlereagh eût conservé entre ses mains la suite complète et régulière des copies de sa correspondance officielle, dont les originaux étaient nécessairement déposés dans les archives de son ministère; à quelques exceptions près, le recueil qu'on vient de mettre au jour consiste en lettres particulières et confidentielles échangées par lui avec les principaux agens de la diplomatie britannique, quelquefois aussi avec des princes et des ministres étrangers. On y trouve par conséquent (et c’est là ce qui en fait la grande valeur) les intentions, les vues du cabinet anglais, ses appréciations sur les hommes et sur les choses, exprimées avec beaucoup plus de franchise et de netteté qu’elles ne peuvent l’être dans les dépêches proprement dites; mais on ne doit pas s'attendre à ce qu'un pareil recueil contienne sur toutes les questions les éclaircissemens, les développemens nécessaires pour les faire bien comprendre de qui n'aurait yas d'avance une connaissance assez étendue de l’histoire politique de cette époque. Lord Castlereagh et ses correspondans, s’entretenant ensemble, en termes familiers et souvent an milieu du tumulte de la guerre, de faits, de différends, de prétentions qui leur étaient yarfaitement connus et qui occupaient toute leur pensée, ne sauraient être toujours intelligibles pour des lecteurs auxquels ils ne prévoyaient sans doute pas que leurs confdences dussent jamais parvenir. L'éditeur de cette correspondance à Ini-même, il est vrai, joué un rôle important dans la plupart des négociations dont le livre par lui puHié nous présente l’histoire, et il aurait pa remplir plus d’une regrettable lacune. Malheureusement il ne parait pas avoir pensé que ce soin füt une partie essentielle de la tâche qu'il avait entreprise, et j’ajouterai qu'à d’autres égards encore il y a porté une négligence difficile à excuser. Malgré ces imperfections, il est juste de reconnaître que le marquis de Londonderry, en livrant au public ce volumineux recueil, a tout à la fois jeté beaucoup de jour sur une des époques les plus intéressantes de l’histoire de l’Angleterre et de l’Europe, et rendu un important service à la mémoire de son frère.