Lord Castlereagh et la politique extérieur de l'Angleterre de 1812 à 1822

88 LORD CASTLEREAGH ET LA SECONDE RESTAURATION.

bons en trahissant ses collègues de la commission exécutive aussi bien que les chambres dont il tenait ses pouvoirs.

Fouché s’était de longue main mis en rapport avec les royalistes, en leur persuadant que seul il connaissait les moyens d’enchaîner, de calmer le parti révolutionnaire, et d’écarter les obstacles qui s'opposaient encore à une restauration. Le duc de Wellington, qui tenait surtout à ce que la rentrée du roi dans Paris ne rencontrât pas une résistance matérielle et ne fût pas attristée par des violences, reçut donc avec empressement les offres de l’ancien terroriste. Ne connaissant peut-être qu'incomplétement son horrible passé et trompé par ses paroles artificieuses, il se laissa persuader que le concours d'un tel homme pouvait être utile, non-seulement pour surmonter les difficultés du moment, mais pour opérer la conciliation définitive des partis, pour fonder, pour consolider en France un régime de liberté et de monarchie légitime. Grâce à ses conseils, grâce à ceux des royalistes les plus ardens à qui Fouché avait su inspirer la conviction que rien ne pouvait se faire sans lui, l'homme de 93 fut admis au nombre des ministres de la royauté restaurée, et sa funeste présence ne contribua pas peu à paralyser l’action, comme aussi à hâter la chute d’un cabinet dont la sagesse et les lumières eussent peut-être contenu de déplorables réactions.

Louis XVIII était rentré dans sa capitale; mais, dès les premiers momens, de graves, d'innombrables difficultés vinrent l’assaillir, malgré les efforts bienveillans du généralissime anglais. Blücher, qui n’avait consenti qu'avec répugnance à accepter la capitulation de Paris, semblait peu se soucier d’en respecter les conditions. Il commença par imposer à cette ville une contribution de cent millions de francs, et par ordonner la destruction du pont d’Iéna, dont le nom lui rappelait de pénibles souvenirs. Les réclamations du gouvernement français eussent été impuissantes à repousser ces mesures d’une rigueur sauvage; ce ne fut pas sans peine que le duc de Wellington vint à bout de faire comprendre à son collègue, non pas qu’elles étaient contraires à la justice et à la politique, mais que, les souverains alliés devant arriver sous peu de jours, il convenait de les attendre avant de rien décider sur de telles matières. Lord Castlereagh, qui s'était empressé d’accourir sur le continent après la bataille de Waterloo, seconda puissamment ces représentations. La présence des souverains et de leurs ministres ne tarda pas à préserver Paris des terribles caprices du vieux maréchal.

Malheureusement l'efficacité de cette protection ne s’étendaït pas aux autres parties de la France livrées à l'invasion étrangère. La guerre était terminée, sauf le siége de quelques places, qui, sans se refuser à reconnaître le roi, ne voulaient pas ouvrir leurs portes