Louis XVI et la Révolution

LA CONSTITUANTE. 187

Voilà certes une majorité peu rancunière et bien peu tyrannique. $2. — LES CAHIERS DE DOLÉANCES À LA CONSTITUANTE.

Pourtant, tout la séparait de la minorité ci-devant privilégiée. On ne s’entendait plus, même pour ces cahiers de doléances, que l’on à appelés avec un peu trop de confiance le bréviaire des constituants. Ils ne furent en réalité que la Bible de la droite, sa loi et ses prophètes. Ce fut la grande tactique des rétrogrades d’opposer aux progressistes les mandats restrictifs que ces derniers avaient en effet très élargis.

Au début, l’infaillibilité des cahiers est reconnue par le tiers lui-même. Par exemple, pour la sanction royale, Rhédon dit, le 29 août 1789 : « C’est ici qu'il faut descendre dans sa conscience et consulter la volonté des cahiers ; or que disent nos cahiers ? Ils portent tous que les lois ne seront exécutées que quand elles seront faites par la nation et sanctionnées par le Roi. C’est donc le vœu général; et si tous nos cahiers, ou du moins si la plus grande partie, annonce celte sanction, il n’est pas besoin de consulter notre prudence ; nos mandats parlent, et nous devons nous taire ; si la majorité, au contraire, rejetait la sanction royale, il faudrait la rejeter également, parce que nous ne sommes rien ici que par nos cahiers. » On est même tellement pénétré de leur excellence qu'au lieu de chercher des arguments dans son esprit, on les puise tout simplement dans les cahiers ; on en lit des morceaux entiers, quelquefois même très longs. Dans une discussion sur les colonies, Clermont-Tonnerre « se borne à faire lecture de l’article de son cahier qui veut que les colonies soient regardées comme provinces ». Les cahiers fournissent encore un exorde commode, un peu comme le texte sacré que le prédicateur cite en