Louis XVI et la Révolution

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de Ferrières : « Le plus grand nombre des députés s’agitait tumultueusement. On entrevoyait sur les visages une inquiétude sombre, un air farouche, une fureur concentrée, qui perçait à travers les efforts employés pour la contenir. »

Personne, pour ainsi dire, n’est républicain à la Constituante, comme personne ne l'est encore dans le pays. Le tiers est sage, il veut tirer le meilleur parti possible de ce qui existe, faire l’économie d’une révolution politique; il trouve qu'une régénération sociale suffit. Ce n’est pas un parti d’opposition, mais de gouvernement. En voici une pren peut-être déc. l'affaire de Nancy.

On sait que trois régiments, celui du Roi, Mestre de Camp général, et les Suisses de Chateauvieux, en garnison à Nancy, s'étaient révoltés vers la fin de juillet 1790, pour différents motifs, et surtout, en apparence, pour une question d’argent : ils prétendaient que leurs caisses étaient mal administrées, et à leur détriment. Ces soldats parurent d’abord peu intéressants, surtout les Suisses. Au témoignage d’un officier d'ordonnance de La Fayette, envoyé à Nancy, ils disaient : Nous ne sommes pas Français, nous sommes Suisses : il nous faut de l'argent. — D’après le rapport officiel, annexé au procès-verbal de la séance du 14 octobre 1790, c’est encore de l'argent qu'ils réclament au maréchal de camp Malseigne : « Le mot argent était le seul mot prononcé par les Suisses. Payez-nous, el nous vous suivrons au bout du inonde. » Leur cupidité avait été enflammée à la vue de cent cinquante mille livres versées aux soldats du régiment du Roi. Rien n'était donc moins sympathique que cette troupe, en grande partie composée de déserteurs, d’après le député Lavie. Tel était, au commencement, l'aspect de la question pour ceux qui en jugeaient à distance. Au premier bruit de cette insurrection, l’Assemblée est très énergique. Sur le rapport d'Emmery, elle décrète le 16 août un blâme sévère pour les révoltés; elle ordonne de rassembler une force militaire spéciale, composée