Mémoires sur la Révolution française

LE DUC D'ORLÉANS MANQUE A SA PROMESSE 425 chez moi, mais tout me semblait affreux et sanglant. Mes gens paraissaient frappés d'horreur. Je n'osai pas coucher seule dans ma chambre; je fis veiller ma femme de chambre avec moi toute la nuit, avec beaucoup de lumières et en priant. Il m'était impossible de dormir : l'image de ce malheureux monarque était sans cesse devant mes yeux. Je ne crois pas qu'il soit possible de ressentir un malheur de famille plus vivement que je ne ressentis la mort du roi. Jusqu'à ce moment, je m'étais toujours flattée que le duc d'Orléans s'était laissé séduire et je voyais les choses sous un faux jour; maintenant, toute illusion était dissipée. Je jetai dehors tout ce qu'il m'avait donné, tout ce que j'avais dans mes poches et dans ma chambre, n'osant pas garder près de moi rien de ce qui lui avait appartenu.

Telle était, en ce moment, la répulsion que j'éprouvais à l'égard d’un homme pour lequel quelque temps

auparavant j'aurais donné ma vie. Nul ne peut se faire