Mémoires sur la Révolution française

JE M'ENFUIS EN APPRENANT QU'ON VA M'ARRÈTER 473 dormis promptement, et à six heures du malin ma femme de chambre entra chez moi et me dit: « Madame, levez-vous tout de suite : il n’y a pas de temps à perdre; vous devez être arrêtée à neuf heures, et votre condamnation à mort est signée. J'ai appris cela hier soir de votre épicier, qui est membre de la section, mais il vous veut du bien et vous avertit de vous sauver. Je voulais vous le dire hier au soir ; mais je n’en ai pas eu le courage, tant vous aviez l'air joyeux; jene vousavais pas vue ainsi depuis bien longtemps.»

Je m'habillai à moitié, en prenant mes diamants et tout ce qui pouvait tenir dans mes poches, et je ne pris pas le temps d’attacher mes jupons, car nous ne savions pas au juste le moment où viendraient ces misérables. Je m'élançai dans les champs, derrière Monceaux, sans savoir où j'allais. Toutela matinée j'errai sur les nouveaux boulevards jusqu’à la Porte-SaintDenis : je me rappelai alors que Milor, le maître de

ballet de l'Opéra, etsa femme la Bigottini demeuraient 10*