Mémoires sur Naigeon et accessoirement sur Sylvain Maréchal et Dalalande : lu à l'Académie des sciences morales et politiques

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vertu, il est vrai , poursuit-il, sans trop être arrêté par la contradiction dans laquelle il tombe, ne peut être dans le principe qu'un motif d'intérêt ; mais l’athée place mieux son intérêt. »

On lui objecte que l’athéisme s'appuyant sur le matérialisme, souffre par là même de grandes difficultés , particulièrement en ce qui regarde la pensée et la liberté; il essaie, tant bien que mal, d'expliquer l’une et l’autre par une propriété de la matière, et il continue ainsi :

« Quand il resterait au surplus quelque obscurité à cet égard, cela vaudrait encore mieux que l'hypothèse de la spiritualité, qui est d'une imagination exaltée et ne conduit qu'à des extravagances et à des folies. »

On lui objecte également que l’athéisme ne rend pas raison de la constitution du monde qui ne s’est pas fait luimême, — Réponse : « Il n’a pas été fait, il n'a pas eu de commencement , et il n'aura pas de fin. »

Newton l’embarrasse presque comme une objection, et après avoir tenté, à plus d’une reprise, en abusané quelque peu de certaines de ses propositions ou plutôt de ses locutions, de l’attirer à l’athéisme , sentant sa peine se perdre, il finit, dans un mouvement d'humeur, par dire que ce n'était pas un philosophe ; que toutes les fibres de son cerveau étaient des fibres calculatrices et qu’il n’en restait pas pour la métaphysique; la nature avait épuisé ses forces pour les premières, et il était d'autant plus fort pour le calcul, qu'il était plus faible d'ailleurs; comme cela se voit même dans ses préncipes, Où il finit par une scolie de quatre pages en l'honneur de la divinité. Quel sacrifice aux préjugés recus ! Quant à lui, Delalande , on ne lui fera pas le même reproche, et si on lui dit souvent : Vous qui con-