Marat inconnu : l' homme privé, le médecin, le savant : d'après des documents nouveaux et inédits

282 MARAT INCONNU

N°1 Extrait de la Gazette de Santé (1777, p. 204.)

Comme jusqu’à présent cette maladie (des yeux) a été confondue avec la goutte sereine, on ne l’a point traitée différemment. Cautères, salivation, purgatifs, vomitifs ont été essayés tour à tour ; remèdes uniquement propres à empirer le mal. Pour peu que l’on connaisse les lois de l’économie animale, on sentira que les indications curatives se réduisent à trois : relâcher les parties affectées, les désobstruer, leur rendre du ressort.

Afin de remplir la première indication, le malade doit observer un régime sévère. Ainsi, point de chocolat, de café, de vin, de liqueurs, de mets de haut goût, il doit aussi éviter le froid, l'exercice forcé, les passions violentes. Sa nourriture sera des herbes potagères bouillies et de la volaille rôtie ; sa boisson, une infusion théiforme de sommités de millefeuille. Le régime fixé, le malade commencera sa cure par une petite saignée au pied, que l'on répètera de huit en huit jours. Dans l'intervalle, il prendra chaque matin à jeun quelques dragmes de pulpe de café délayé dans de l’eau. Lorsque les liqueurs auront acquis de la fluidité, il portera sur les temples un topique émollient et recevra des fumigations antispasmodiques à l’aide d’un instrument propre à diriger leur

‘action sur les yeux.

Par ce moyen l’irritation des muscles de l'œil s’affaiblira, l’engorgement diminuera, et la vision commencera à se rétablir.

Alors on aura recours à l’électrisation; mais l'on se bornera à tirer matin et soir quelques étincelles des angles de l'œil ; le malade portera à la région temporale un petit emplâtre de gomme tacamahaca, et ajoutera à chaque verre d'infusion de millefeuille deux grains de sel de nitre. Ces remèdes propres à désobstruer les parties affectées rempliront la seconde indication.