Napoléon Ier et le Roi Louis : d'après les documents conservés aux archives nationales
x NAPOLÉON Ie ET LE ROI LOUIS.
il adressa de Paris à Schimmelpenninck un traité et un projet de constitution rédigés en dehors de toute participation du gouvernementbatave, et signifia que si, dans les dix jours, ces deux pièces ne lui étaient retournées avec la ratification de Leurs Hautes Puissances, il prendrait les mesures les plus rigoureuses. Dans la bouche du vainqueur d’Austerlitz, les menaces n'étaient point vaines. On céda. Toutefois la ratification ne fut point soumise, comme il l’avait demandé, au corps législatif, le grand-pensionnaire ayant décliné toute démarche qui aurait eu pour but de la provoquer. Elle fut accordée uniquement au nom de la Grande-Besogne, sorte de consulte officieuse, composée des ministres, des conseillers d'État, des principaux magistrats et des membres de Leurs Hautes Puissances, que Schimmelpenninck avait rassemblée dès qu'il avait connu les intentions du gouvernement français, et avec laquelle il avait agi de concert pendant toute la durée des négociations (1). Napoléon se contenta de cette apparence d'acceptation nationale. C'était mieux qu’il n’attendait peut-être; car, en prévision d’un refus, un décret était rédigé d'avance qui instituait d'office la monarchie (2). Ainsi fut conclu le traité du 24 mai 1806, qui, supposant dans son préambule un plein accord entre les deux
(1) Nous empruntons ces détails à M. Albert Réville. Aucune trace de la GrandeBesogne ne se trouve dans les documents français que nous avons été à même de consulter.
(2) Entre le 15 et le 20 mars 1806, Talleyrand écrivait à l'empereur : « V. M. trouvera dans ce dossier le projet de décret qu’elle m'a ordonné de lui présenter relativement aux changements à faire dans la République batave. Si les autorités existantes se portaient à concourir à ce changement, les articles du décret seraient rédigés de manière à former un pacte dont la forme est jointe à ce décret; si, ce que je pense, les autorités ne concourent point ou sont lentes à s’y décider, le décret est la seule forme possible. J'y ai fait entrer toutes les idées que V. M. m'a
“indiquées dans la lettre qu’elle m'a fait l'honneur de m'écrire. » (Voir. Annexe
n° 2.)