Napoléon Ier et le Roi Louis : d'après les documents conservés aux archives nationales

‘394 .- ANNEXE.

Je me suis trompé; et si le dévouement absolu que j'ai montré pour mes devoirs, le 1° avril dernier, n’a servi qu'à traîner ou à prolon-ger l’existence du pays durant trois mois, j'ai la satisfaction cruelle, douloureuse (mais c’est la seule que je puisse avoir), que j'ai rempli -ma tâche jusqu'au bout ; que j'ai, s’il m'est permis de m'expliquer ainsi, sacrifié à l’existence et à ce que je croyais le bien-être du pays plus qu’il n’est permis dé le faire.

Mais, après la soumission et la résignation du 1° avril, je serais trop blâmable si je pouvais rester avec le titre de roi, n'étant plus ‘qu'un instrument, ne commandant non-seulement pas dans le pays, mais même pas dans ma capitale, et peut-être bientôt même plus dans mon palais. Je serais cependant témoin de tout ce qui se ferait sans pouvoir rien pour mon peuple. Responsable de tous les événements, sans pouvoir les prévenir ni les influencer, je serais en butte aux plaintes des deux côtés, et cause apparente de tous les malheurs ; je trahirais ma conscience, mon peuple, mes devoirs en le faisant.

Il y a longtemps que je prévois l'extrémité où je suis réduit ; mais je n'aurais pu léviter qu’en trahissant les plus sacrées de mes obligations, qu'en cessant de prendre les intérêts et d’attacher mon sort à celui de ce pays : je ne pouvais le faire.

Maintenant que la Hollande est réduite à cet état, je n'ai comme roi de Hollande qu’un parti, c’est celui d’abdiquer en faveur de mes enfants. Tout autre parti aurait encore augmenté les malheurs de mon règne. J'aurais rempli avec affliction ce pénible devoir; j’aurais bravé le spectacle de la ruine de tant d'habitants trop souvent victimes des querelles des gouvernements ; mais comment soutenir l’idée d’une résistance armée quelconque? Aurais-je pu endurer le spectacle de voir, pour mes enfants nés français comme moi, pour une cause juste mais qu’on aurait pu croire seulement la mienne, couler le sang français ? À

Je n’ai donc qu'un parti. Mon frère, fortement aigri contre moi, ne l’est pas contre mes enfants; et sans doute il ne voudra pas détruire ce qu'il a fait et leur ôter leur héritage, puisqu'il n’a et n'aura jamais de sujets de plainte contre un enfant qui de longtemps ne règnera pas par lui-même. Sa mère, à qui la régence appartient par la constitution, fera tout ce qui sera agréable à l’empereur mon frère, et'y réussira mieux que moi, qui ai eu le malheur de ne pou-