Opuscules et fragments inédits de Leibniz : extraits des manuscrits de la Bibliothèque royale de Hanovre

PRÉFACE VII

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sciences morales, dans la séance générale de l'Association; elle fut approuvée et adoptée à l'unanimité. Trois Académies [l'Académie des sciences de Berlin, l'Académie des sciences morales et l'Académie des sciences de Paris) ont été chargées de préparer l'édition projetée. Peut-être nous sera-t-il permis de donner notre opinion à ce sujet, sans autre titre que celui d’avoir vu et manié les manuscrits de Leibniz, et sans autre prétention.que de servir une entreprise à laquelle nous regrettons de ne pouvoir collaborer autrement.

Avant tout, il faut dire que ce qui fait la difficulté de la tâche, c’est son énormité : la totalité des manuscrits laissés par Leibniz à sa mort et conservés à la Bibliothèque Royale de Hanovre remplirait de 80 à 100 volumes in-8°; et il y faudrait ajouter les lettres et les papiers qui se trouvent dispersés en Europe. Aussi tous ceux qui ont entrepris une édition complète de l’œuvre de Leibniz, ou même d’une partie spéciale de cette œuvre, ont-ils succombé à la tâche ‘, ou n’ont laissé que des éditions absolument incomplètes, même pour la partie qu'ils prétendaient épuiser *. C'est justement pour cela que l’on a fait appel à l'Association internationale des Académies, et c'est pour de telles entreprises qu'elle a été expressément créée, à savoir pour des entreprises qui dépassent les forces et les ressources d’un seul homme ou même d’une association privée, et qui demandent le concours et l’appui d'institutions publiques et permanentes. Aussi ne peut-on s'élever trop énergiquement contre un avis qui aurait été émis au sein de l'Association, et qui tendrait à « faire un choix » entre les manuscrits. Faire un choix! Mais c'est ce qu'ont fait déjà tous les éditeurs précédents; et le résultat en est que nous n'avons de documentation complète sur aucune des parties de l’œuvre de Leibniz, sur aucune des faces de son génie encyclopédique et de son activité universelle. Si l'édition projetée ne doit pas être absolument complète, ce n’est pas la peine de l’entreprendre, et de mettre en branle trois Académies pour faire un recueil qui soit à l’édition Gerhardt ce que celle-ci est à l'édition Erdmann. On dira que ces savants, pourtant intelligents, ont mal choisi, et que le choix futur sera meilleur. Qu'en sait-on? Tout choix est essentiellement subjectif et arbitraire : ce qui intéresse celui-ci paraît sans importance à celui-là. Et puis, qui peut prétendre juger si tel fragment offre ou n'offre pas d'intérêt? Faut-il donc rappeler à des érudits que rien de ce qui émane d’un grand esprit comme Leibniz n'est insignifiant et indifférent, surtout lorsque cet esprit n’a presque rien publié de

1. Notamment Perrz (1843-47) et Krorp (1864-84).

2. Comme EromanN, qui intitulait faussement son édition : « Opera philosophica quæ exstant … Omnia », et GERHARDT, qui a travaillé 50 ans (1849-99) à la publication des manuscrits mathématiques et philosophiques de Leibniz, et n’en a pas publié la moitié, ni même les plus intéressants.