Opuscules et fragments inédits de Leibniz : extraits des manuscrits de la Bibliothèque royale de Hanovre
PRÉFACE XI
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logie; d'autant plus que, pour Leibniz et son temps, la philosophie comprenait encore toutes les sciences de la nature '. Aïnsi le moins qu'on puisse faire est de réunir dans une série unique toutes les œuvres philosophiques, scientifiques et théologiques. On pourrait former, pour des raisons analogues, deux autres séries au plus : une série historique, politique et juridique, et une série littéraire et philologique. Mais que de liens encore romprait cette tripartition! Les œuvres théologiques de Leibniz se rattachent étroitement à son activité de politique et de diplomate : on sait à quelle méprise a donné lieu son Systema theologicum, qu’on a pris pour une profession de foi personnelle, alors qu’il n'est qu’un projet diplomatique d’entente et de conciliation entre catholiques et protestants ?} De même, ses études scientifiques sont intimement unies à ses recherches historiques : on sait que sa Protogæa était dans sa pensée la préface naturelle de sa grande œuvre historique. Enfin, comment séparer ses théories de politique et de droit naturel de sa morale qui en contient les principes; ou ses travaux de philologie comparée de ses œuvres historiques, alors qu'il considérait l’étude des langues comme une méthode pour découvrir les origines des peuples; ou ses méditations de grammaire rationnelle de son projet de langue universelle, qui dépend entièrement de sa logique et de sa caractéristique? On le voit : partoutoù l’on essaiera de pratiquer une section dans cette œuvre encyclopédique, on tranchera dans le vif d’une pensée toujours une et continue sous la variété de ses objets. C’est que, si la philosophie est essentiellement un effort pour ramener tout à l'unité et pour penser systématiquement, aucun philosophe ne réalisa cet idéal au même degré que Leibniz. Démembrer son œuvre, c’est dénaturer sa pensée.
[1 y a en tout cas une partie de cette œuvre qu’on ne peut raisonnablement songer à classer ainsi : c’est sa volumineuse correspondance *. En effet, il arrive souvent que dans une même lettre il traite dix ou douze sujets différents et même hétérogènes. Aussi est-il ridicule de classer telle lettre dans les œuvres philosophiques et telle autre dans les œuvres mathématiques, en général, uniquement en raison de la profession du correspondant ‘. Pour la correspondance tout au moins, il n’y a qu’un classement admissible : c’est l’ordre chronologique *.
Dira-t-on que, du moins, on pourrait séparer ses œuvres de sa corres-
1. V. Puiz., VIII, 56-57, comment Leibniz conçoit la division de la philosophie, c’est-à-dire ce que nous appellerions la classification des sciences.
2, V. La Logique de Leibniz, p. 164, et note 6.
3. La correspondance de Leibniz comprend 15 000 lettres. Lui-même disait qu'il écrivait environ 300 lettres par an.
4. V. La Logique de Leibniz, p. vin, note 1.
5. Est-il besoin de montrer combien il est fâcheux de classer les lettres d’après leurs destinataires, comme a fait Gernarpr? Ce qui importe, c’est le contenu et la date d’une lettre, ét non pas le nom du correspondant : souvent Leibniz expose les