Orateurs et tribuns 1789-1794

L'ESPRIT DES ORATEURS DE LA CONSTITUANTE. 7

fiance sans bornes. Tandis que l'abbé Maury ! passait à Coblentz vingt-quatre heures de gloire, avant de prendre la route d'Italie pour se rendre à son chapeau,

4. Jaloux de Cazalès, l'abbé Maury lui accordaïit quelques bouffées de talent el une certaine colère d'expression qu'on prend pour de l'éloquence, mais en même temps il donna à Montlosier d'excellents conseils qui peuvent servir encore aux néophytes de la tribune. « Il faut d’abord bien étudier son sujet et non seulement l'étudier, mais le savoir parfaitement. Pour le savoir ainsi, il est commode, quelquefois nécessaire de l'écrire. Après l'avoir écrit et su, la bonne manière est de déchirer ses feuilles, sauf à les écrire encore de nouveau, si quelque chose du sujet ou de ses compartiments vous échappe; je dis compartiments, car les matériaux d'un diseours sont comme ceux d’un édifice. Chaque pièce considérée à part peut avoir du mérite; ce n'est que par leur ordre et l’ensemble de leur position qu'elles ont de l'effet. Boileau a dit: d'un mot mis à sa place enseigna le pouvoir. Cette mise à sa place est bien plus essentielle encore pour chaque masse d'idées. C'est donc avant tout ce compartiment, la liaison de nos idées entre elles et leur enchaînement que vous devez apprendre et parfaitement savoir. A cet égard, ilya deux espèces de mémoire : la mémoire des formes, mémoire toute mécanique, toute matérielle, qui consiste à mettre dans sa tête une succession quelconque de phrases. C'est la mémoire qu'on impose aux enfants; c’est aussi celle des prédicateurs et des faiseurs ordinaires de sermons.. L'autre mémoire, celle à laquelle vous devez vous attacher, c’est la mémoire de la distribution et de l’enchaînement des idées; c’est celle qu'ont cultivée et que cultivent tous les grands orateurs du barreau... »

A la séance du 3 mai 1790, pendant une violente discussion, l'abbé Maury, en réponse à des interruptions de la gauche, fait le geste de lever la jambe. Les noirs de s’indigner. « Il va p.…., qu'on l'arrête. » Le président ayant réclamé des explications, Maury répond que sa jambe levée n'est qu'un geste pour montrer qu'il fopar passer toute l'Assemblée sous sa jambe. S