Orateurs et tribuns 1789-1794
8 ORATEURS ET TRIBUNS.
Cazalès était à peu près éconduit comme démocrate, lui qui, à la tribune de la Constituante, jurait naguère de rester fidèle au sang de Henri IV et de saint Louis, en dépit des décrets et des événements. Comme il était devenu bicamériste ou partisan des deux Chambres, on imagina de tourner ses opinions en dérision, et plusieurs émigrés vinrent, à tour de rôle, prévenir le maître de l’auberge où il devait descendre, qu'il fallait deux chambres à M. de Cazalès. L’hôtelier alla à sa rencontre et lui témoigna son regret de n'avoir qu'une chambre à lui offrir, Coblentz étant alors très encombré ! Cazalès comprit qu’on le traitait en suspect, garda le silence, demanda seulement à servir aux avant-postes et fit obscurément dans l’armée de Condé la campagne de 1792. C'était tourner le dos au succès, aux règles les plus évidentes de la bonne politique, que d'en agir ainsi avec un homme d'un tel mérite : autant vaudrait charger un ingénieur de casser des pierres sur les routes, un architecte de porter des moellons. Et Carnot avait-il si grand fort de répliquer à Cazalès, lorsque après le 18 fructidor, celui-ci cherchait à le convertir : « Que pourrait faire pour moi Louis XVIII? Me permettre de sortir de France ? d’émigrer !.. Vous savez, monsieur de Cazalès, quel est le sort d’un émigré ! Quel serait donc le sort d'un émigré régicide si Louis XVIIT montait sur le trône? »
Cazalès est orateur et, comme Barnave, improvisateur, même dans les discussions techniques. Cependant