Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

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puissante sur le cœur de Tallien. Bordeaux ne respire pas encore, mais son sort devient moins rigoureux. Le comité de salut public s’indigna bientôt de ce que ses mandats de mort étaient mal exécutés à Bordeaux. Tallien fut rappelé. Robespierre sut quel nouvel ascendant s’était fait sentir à un homme qu'il ne cessait de craindre depuis la mort de Danton. Transporté de rage, il fit arrèter Mme de Fontenay. Il la fit plonger dans un cachot. Elle sut tromper ou fléchir les plus barbares geoliers. Elle écrivait à Tallien ; elle attendait la mort, mais elle excitait à la vengeance celui qu’elle avait rappelé à l'humanité.

Le 6 thermidor , Robespierre vint offrir à tous ses ennemis rassemblés dans la convention les moyens de le frapper. U lut-un discours dans lequel il annonçait d'importantes révélations. On sut par lui que le sanguinaire dictateur de la France n’était point le maître des comités de salut publie et de sûreté générale , qu'il haïssait même les hommes qui lui ressemblaient le plus, un Billaud, un Collot, un Amar, un Vadier, et Cambon, le régulateur des finances révolutionnaires! Cette même assemblée qu’il asservissait depuis quinze mois , il la prenait pour arbitre dans ses démêlés avec ses rivaux. Il lappelait à son secours, et en même temps il annonçait tant de nouvelles proscriptions , qu’il était bien peu de députés qui: pussent se croire assez ignorés ou assez méprisés du tyran pour n'être pas voués à la mort. L'appareil de ses phrases obscures et déclamatoires ressentait trop l’épouvante dont il était luimême atteint pour produire toute la terreur accoutumée. Enfin ; chose absurde dans un homme dévoré et poursuivi par tant de haïînes , il ouvrait le combat sans vouloir le terminer dans un jour; il ne proposait aucune mesure.

Le débat s’ouvrit sur l'impression du discours de Robes“pierre; faible honneur qu’on n’avait jamais osé lui refuser. On vit s'offrir comme auxiliaires des comités de salut publie et de sûreté générale menacés, des hommes qui n’en étaient pas moins les ennemis que de Robespierre lui-même. Il y avait cependant une partie de l'assemblée qui refusait encore de combattre pour le choix des tyrans. Elle était formée des débris du parti de la Gironde. Ces députés furent étonnés de se voir consultés après tant d’outrages et de servitude. Leur indécision avait déjà donné un triomphe momentané à Robespierre. L’impression de son discours était ordonnée. On réclame avec fureur contre le décret. Robespierre est accusé de tyrannie par Billaud, par Cambon, par Amar et Vadier. Ce dernier lui reproche d’avoir voulu soustraire des contre-révolutionnnaires.